L’aide militaire étatsunienne au Maghreb

Un article intéressant sur PBS.org sur les montants d’aide militaire versés par les Etats-Unis en 2010 et depuis 1946 mérite quelques commentaires. Si Israël est numéro 1 sur toute la période, l’Afghanistan reçevait plus en 2010, tandis que l’Egypte se trouve à la 3e place dans les deux cas – même si l’aide militaire étatsunienne n’atteint jamais le compte du ministère de la défense à la banque centrale égyptienne:

« The $1.3 billion that goes to the Egyptian army doesn’t really go to the Egyptian army. It goes to an account that stays in the U.S. for the Egyptian army to buy U.S. hardware, » said Farouk El-Baz, an Egypt-born scientist and administrator at Boston University who was an adviser to the late President Anwar Sadat.

Egypt is « totally dependent on U.S.-made military hardware, » El-Baz said, and has been since 1979, when what amounts to a U.S. monopoly on arms sales to Egypt was written into the Camp David Accords. Prior to that agreement establishing peace with Israel, Egypt’s military had been a Soviet client.

« The aid is recycled within the U.S., » said Mohammed Akacem, a professor of economics at the Metropolitan State University of Denver. Taxpayers give the money to the IRS, which disburses it to the Pentagon, which spends it with U.S. defense contractors.

The Egyptians then take the arms, which over the years have included the F-16 air-to-air combat fighter from Lockheed Martin and the M1A1 Abrams tank from General Dynamics.

« It’s what we used to call ‘tied aid’ back in the ’70s and ’80s, » said Akacem, referring to an aid agreement that stipulates that the recipient country must spend its aid money within the donating country.

Les montants versés à l’Egypte sont faramineux sur la période – plus de 57 milliards d’USD, même si ce montant pâlit par rapport aux 123 milliards d’USD versés à Israël.

Le cas de la Turquie est intéressant: si ce pays est 4e sur la période 1946-2010, avec 40 milliards d’USD soit 6,11% du total de l’aide militaire à l’étranger, il ne reçevait que 5 millions d’USD en 2010, soit 0,04% seulement de l’aide militaire US à l’étranger cette année-là.

On retrouve d’autres surprises – le Soudan reçevait ainsi près de 127 millions d’USD en 2010 – mais c’était avant la sécession du Sud-Soudan, effective en 2011, et on peut peut-être présumer que l’aide militaire allait aux forces du SPLA constituant l’ossature de l’armée du Sud-Soudan plutôt que l’armée du nord, dirigée par le président Omar Bachir, dont les Etats-Unis ont obtenu qu’il soit inculpé par la Cour pénale internationale, sur saisine – en 2005 – du Conseil de sécurité. Le Venezuela reçoit quant à lui 329.000 USD et la Chine 190.000 USD – dans ces deux cas, on peut présumer qu’il s’agit de la formation d’officiers de ces pays aux Etats-Unis ou des activités assimilées. Le montant que ne parviens absolument pas à comprendre ce sont les 127 millions d’USD pour la Russie en 2010 – si quelqu’un a des explications à ce sujet, je suis preneur…

Voyons de plus près les montants pour le Maghreb, d’abord en 2010 puis sur la période 1946-2010:

2010:

1- Tunisie $20,313,000

2- Maroc $12,322,247

3- Algérie $1,015,000

4- Libye $469,000

5- Mauritanie $407,000

1946-2010:

1- Maroc $2,334,870,797

2- Tunisie $1,776,127,354

3- Libye $99,662,397

4- Algérie $10,459,519

5- Mauritanie $4,453,616

Quelques remarques:

  • Globalement, le Maghreb est une région peu importante dans le cadre de l’aide militaire US – au total, les 5 Etats du Maghreb ont reçu ensemble 0,67% de l’aide militaire globale des Etats-Unis de 1946 à 2010 – et cette importance est en chute libre, puisque ces 5 Etats ne totalisaient que 0,22% du total de l’aide militaire US en 2010. L’Egypte reçoit en trois ans ce que le Maghreb a reçu de 1946 à 2010. Ca choquera quelques Marocains et peut-être surtout quelques Algériens, mais le Maghreb n’est pas, militairement et stratégiquement parlant, au coeur de la vision US sur le monde qui les entoure – encore que l’évolution de la Libye pourrait changer la donne, même si l’aide militaire à strictement parler ne semble pas d’actualité pour cet Etat pétrolier.
  • Si le Maroc est le premier bénéficiaire de l’aide militaire US en valeur absolue, la Tunisie est bien évidemment la première par habitant, sa populationétant un tiers de celle du Maroc;
  • Maroc et Tunisie, tous deux au régime conservateur sur le plan politique, libéral en matière économique et pro-occidental (depuis 1961 pour le Maroc) se partagent 97% du total de l’aide militaire US sur la période;
  • La Libye et l’Algérie ont reçu très peu – pas seulement en raison de leur régime politique et des choix diplomatiques qui en ont découlé, mais aussi surtout en raison de leur caractère d’Etats rentiers, avec de très fortes entrées de devises en raison d’exportations d’hydrocarbures. Ceci n’empêche pas des liens sécuritaires très bons entre l’Algérie et les USA;
  • La Mauritanie paie bien évidemment des choix politiques malheureux vu de Washington – l’alignement sur l’Irak en 1991, et sans doute aussi une très faible capacité d’absorption de ses forces armées, de très loin le splus faibles des cinq Etats maghrébins;
  • Ces chiffres devraient être complétés par les statistiques de ventes d’armes sur la même période pour donner une image complète des liens militaires avec les Etats-Unis – mais ça ne bouleverserait pas véritablement le classement, car la Tunisie et surtout le Maroc s’équipent auprès des Etats-Unis mais également auprès d’autres pays de l’OTAN – surtout la France et l’Espagne pour le Maroc.On constate, à lire les statistiques de SIPRI sur la période 1950-2012, que l’Algérie a acheté 20 de ses 24 milliards USD d’armes auprès de l’URSS/Russie; pour la Tunisie, sur 1,9 milliards d’USD d’achats d’équipements militaires sur la même période, 768 millions d’USD sont achetés aux USA, 482 millions à la France, 217 à l’Allemagne et 134 à l’Italie – les pays OTAN ou UE représentent 96% des achats d’armement tunisiens; la Mauritanie, qui n’a dépensé que 323 millions d’USD sur cette période, en a acheté environ un tiers hors UE/OTAN, mais son premier fournisseur est la France, son deuxième l’Espagne et son troisième la Chine. Pour la Libye, les compteurs explosent: 31 milliards d’USD d’achats d’équipement militaire, avec la part du lion détenue par l’URSS/Russie, avec 23,5 milliards, et une honorable deuxième place pour la France (3,3 milliards) et une troisième place à l’Italie (1,4 milliards), des chiffres probablement en voie de changer avec le changement de régime. pour le Maroc, qui n’a pas la rente hydrocarbures de la Libye ou de l’Algérie, le montant n’est « que » de 9,5 milliards, dont 90% achetés auprès de fournisseurs OTAN ou UE, la France (3,4 milliards) et les Etats-Unis (3,3 milliards) étant au coude à coude, loin devant les Pays-Bas (508 millions) et l’espagne (500 millions). On notera les faibles montants, pour ces cinq pays, des ventes britanniques et allemandes.
  • Plus intéressant encore pour la pérennité des liens militaires, la formation des militaires est probablement l’élément le plus efficace pou nouer des liens personnels et politiques entre armées étrangères (d’où l’active politique marocaine de formation de militaires de pays francophones d’Afrique de l’Ouest, notamment à l’Académie royale militaire de Dar Beida à Meknès). On sait le rôle politique fondamental dans le régime politique algérien de l’armée, des anciens officiers de l’armée française ayant rejoint le FLN (assez tard pour certains…) – les DAF, alors que la majeure partie des officiers des générations ultérieures aura été formée en Egypte ou en URSS. Si les autres armées maghrébines ne semblent pas traversées par des rivalités aussi prononcées, difficile de se pronconcer là-dessus en l’absence de données chiffrées et crédibles;
  • Enfin, les liens avec l’OTAN – si on sait que le Maroc est le seul des 5 pays maghrébins à être officiellement un « major non-NATO ally » aux yeux du gouvernement étatsunien, l’OTAn a lancé en 1994 le Dialogue méditerranéen, qui vise – selon son document de base – à nouer des relations de coopération militaire et politique avec les pays méditeranéens. Quatre des cinq pays maghrébins en font partie, à l’exception de la Libye, invitée à participer en 2012 cependant. De nombreux exercices et manoeuvres communs ont ainsi été menées entre armées de l’OTAN et armées maghrébines, surtout le Maroc mais également l’Algérie.

Même morts ils ne servent à rien

Le terrorisme est un instrument idéologique – ça permet de justifier ce que des dictatures latino-américaines ou arabes auraient honte d’admettre en public, comme PRISM ou l’assassinat politique par voie de drone, ou l’assassinat d’un quidam – Jean Charles de Menezes – dans le métro de Londres. C’est un multiplicateur – un mort suite à une action vaut X fois plus qu’un mort dans un incendie d’usines de confection bangladeshies, un mort dans un bombardement étatsunien ou un mort dans un massacre syrien. Ce qui est important n’est plus la victime, mais l’auteur de sa mort, et surtout l’identité ou les convictions de cet auteur, et leur utilité dans le discours social, politique ou médiatique dominant. Il est des morts idéologiquement inutiles.

kidswithguns

C’est ainsi qu’en 2013, plus de personnes sont mortes par armes à feu manipulées par des enfants de trois à six ans aux Etats-Unis que dans des attentats terroristes (et encore pourrait-on discuter de la définition d’attentats terroristes aux Etats-Unis et ailleurs, tant terrorisme rime avec islamisme dans l’opinion commune):

Americans hate terrorists and love our kids, right? So you might be shocked to know that preschoolers with guns have taken more lives so far this year than the single U.S. terrorist attack, which claimed four lives in Boston.

This is admittedly tongue-in-cheek, but one has to wonder if the NSA’s PRISM program would have saved more lives had it been monitoring toddlers – or gun owners – rather than suspected terrorists.

11 Deaths in Five Months Where Shooter Was 3 to 6 Years Old

Listed below are the 11 gun fatalities I found where a preschooler pulled the trigger (from Jan. 1 to June 9, 2013). Starting with a list of five toddler shooting deaths The Jewish Daily Forward published in early May, I unearthed six additional cases. This tragic, unthinkable event has happened every month, like clock-work.

Jan. 10: 6-year-old playmate shoots and kills 4-year-old Trinity Ross, Kansas City, Kan.

Feb. 11: 4-year-old Joshua Johnson shoots and kills himself, Memphis, Tenn.

Feb. 24: 4-year-old Jaiden Pratt dies after shooting himself in the stomach while his father sleeps, Houston.

March 30: 4-year-old Rahquel Carr shot and killed either by 6-year-old brother or another young playmate, Miami.

April 6: Josephine Fanning, 48, shot and killed by 4-year-old boy at a barbecue, Wilson County, Tenn.

April 8: 4-year-old shoots and kills 6-year-old friend Brandon Holt, Toms River, N.J.

April 9: 3-year-old is killed after he finds a pink gun that he thinks is a toy, Greenville, S.C.

April 30: 2-year-old Caroline Sparks killed by her 5-year-old brother with his Cricket “My First Rifle” marketed to kids, Cumberland County, Ky.

May 1: 3-year-old Darrien Nez shoots himself in the face and dies after finding his grandmother’s gun, Yuma, Ariz.

May 7: 3-year-old Jadarrius Speights fatally shoots himself with his uncle’s gun, Tampa, Fla.

June 7: 4-year-old fatally shoots his father, Green Beret Justin Thomas, Prescott Valley, Ariz.

At least 10 more toddlers have shot but not killed themselves or someone else this year (see here, here, here, here, here, here, here, here, here and here). In the first three cases, the shooter was only 2 years old.

I also found nine instances where children and teens 7 to 19 years old accidentally killed themselves, a family member or friend since January (see here, here, here, here, here, here, here, here and here).

Of course, most if not all of the above deaths and injuries can be attributed to careless adult gun owners.

While this analysis focuses on children, another equally accurate headline could read: “U.S. Gun Culture Kills More Americans Than Terrorists Worldwide.”

In 2010, 13,186 people died in terrorist attacks worldwide, while 31,672 people were killed with firearms in America alone, reports CNN’s Samuel Burke. (Opposing Views)

Mon amie Judith Butler et sa théorie sur le Pouvoir des mots – politique du performatif ne me contredirait sans doute pas: voilà des morts qui ne servent à rien.

La Semaine de S.M. le Roi Mohammed VI à Hawaii: l’oeuvre d’un homme, Driss Guerraoui

Être silencieux ou commenter? Voilà un cruel dilemme auquel je suis souvent confronté en suivant l’actualité marocaine. Un exercice constant d’humilité: qu’est ce que je peux apporter de plus à l’intelligibilité ou à l’interprétation d’une information, d’un fait ou d’une situation? C’est comme avec cet article du Matin du Sahara, sobrement intitulé « La Semaine de S.M. le Roi Mohammed VI à Hawaii: L’occasion d’explorer de nouveaux domaines de coopération «mutuellement bénéfiques» » (la page officielle est ici et, ça ne s’invente pas, cet événement a lieu au Royal Hawaiian Center), dans le style propre de cet organe de… presse.

Une semaine dédiée au Roi à Hawaii? Comment ne pas s’en réjouir? La taille de cet Etat et son rayonnement politique, économique et culturel ne permettent pas, sauf aux esprits les plus rétifs au sens national et à l’amour du drapeau, d’en discuter le choix. Comment nier le caractère stratégique de cette manifestation, alors que ses promoteurs étatsuniens – et néanmoins irréprochables – nous répètent qu’elle s’insert dans le dialogue stratégique Etats-Unis-Maroc? Notre quotidien national (quoique de propriétaire saoudien) se réjouit ainsi, via la MAP, de ce que les importations marocaines en provenance des Etats-Unis ont littéralement explosé – jamais le Maroc n’a autant importé des Etats-Unis, souligne-t-il ainsi fièrement et légitimement, faisant montre de la légendaire tolérance et hospitalité marocaine, heureuse de creuser son déficit commercial si ça peut faire plaisir à un Américain:

Le lancement, le 13 septembre dernier, du Dialogue stratégique Maroc-Etats-Unis intervient à un moment où les relations économiques et commerciales entre les deux pays connaissent un essor sans précédent, à l’image des relations privilégiées et historiques qu’entretiennent Rabat et Washington. En effet, le Royaume a fait son entrée, pour la première fois, au «Top 5 des marchés arabes» les plus importants pour Washington, avec un volume d’importations de produits américains dépassant 2,86 milliards de dollars en 2011, soit une hausse de 47% par rapport à leur niveau de 2010.

Le Maroc se positionne ainsi en quatrième position dans le monde arabe en tant que marché de deahmed hajjistination pour les exportations américaines en 2011, selon un classement établi par la Chambre arabo-américaine du commerce (NUSACC).

Etat de naissance du président Obama, Hawaii présente de fortes similitudes avec le Maroc, comme le savent les ethnologues et le gouverneur démocrate de cet Etat:

La Semaine de Sa Majesté le Roi Mohammed VI à Hawaii, qui se tient du 28 novembre au 2 décembre dans la capitale Honolulu, constitue «un événement très spécial pour Hawaii et sa population», a affirmé le gouverneur démocrate de cet État, Neil Abercrombie, dans un communiqué rendu public à cette occasion. «En tant que gouverneur de l’État d’Hawaii ayant servi dix-neuf années au Congrès des États-Unis, je me réjouis de l’opportunité que j’ai pu avoir pour connaître et aimer le Royaume du Maroc, tout en me félicitant des similitudes et des valeurs que nous avons en partage», a indiqué M. Abercrombie, qui a été élu septième gouverneur de cet État US du Pacifique en décembre 2010. Et de souligner que «la Semaine de Sa Majesté le Roi Mohammed VI à Hawaii constitue un événement très spécial non seulement pour moi, mais aussi pour l’État d’Hawaii dans son ensemble».

Le programme de cette manifestation paraît survolté et surchargé – jugez en – la signature d’un accord de jumelage, création de l’association d’amitié Maroc-Hawaii, signature d’un mémorandum d’entente avec la CGEM:

Un programme riche et varié a été élaboré à l’occasion de cette semaine qui sera marquée notamment par la signature d’un accord de jumelage entre la région de Rabat-Salé-Zemmour-Zaer et l’État d’Hawaii, d’un mémorandum d’entente pour la création de l’Association d’amitié Maroc-Hawaii, ainsi que par d’autres accords relatifs, entre autres, à la formation aux métiers des sports de la mer, et à la promotion du partenariat en matière de tourisme.

Il sera également procédé à la signature d’un mémorandum d’entente entre la Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM) et la Chambre de commerce d’Hawaii, et d’un autre relatif à la promotion de la recherche et de l’expertise entre East West Center et l’Association d’études et de recherches pour le développement [AERED].

La Semaine de S.M. le Roi Mohammed VI à Hawaii verra également l’inauguration officielle des expositions d’artisanat et de «la région de Rabat-Salé-Zemmour-Zaer : passé, présent et futur», ainsi que la tenue d’un forum sur «les réformes politiques majeures, les droits de la femme et la modernisation économique au Maroc», en plus d’autres événements d’une grande portée symbolique et culturelle.

La présence de l’AERED rassure l’observateur impartial. AERED? me demandez-vous, ignorants que vous êtes. Ben oui, l’AERED, association présidée par Driss Guerraoui, qui se trouve aussi être, homme fort occupé qu’il est, secrétaire-général du Conseil économique et social et président de l’Association arabe pour la prévention sociale – sans compter qu’il prodigue ses multiples bienfaits également à l’international. Ca tombe bien d’ailleurs que cette association ait été présente, puisque les liens de son président avec Hawaii, à défaut d’être multi-séculaires, sont profonds: son CV rapporte ainsi qu’il a obtenu une distinction de la part de l’UNESCO (section de l’Etat de Hawaii) (1) en 2003. Des recherches plus amples nous informent qu’il a inauguré en 2004 « une stèle de la paix offerte par les jeunes de Hawaï » alors qu’il était « coordinateur national du Forum des jeunes marocains du 3-ème millénaire« . On apprend par ailleurs que la mémorable deuxième édition du Congrès mondial pour la jeunesse avait eu lieu au Maroc en 2003, alors que la première édition avait eu lieu à Hawaii, l’inoxydable Driss Guerraoui étant par ailleurs déjà coordinateur national de cet événément. Fait considérable, alors que des esprits simples pourraient croire que les liens multiséculaires entre Hawaii et le Maroc dateraient simplement de cette semaine, ils datent en fait au moins de 2004, comme nous l’apprend une dépêche de la MAP de 2004: une « délégation marocaine représentant la Primature et l’Office National Marocain du Tourisme (ONMT) » s’était alors rendue à Honolulu. La MAP précisait alors:

Cette visite entre dans le cadre d’une coopération qui a pris naissance en 1999 lors de la tenue, à Honolulu, du Millenium des Jeunes, et qui s’est consolidée en 2003 lors du Congrès Mondial de la Jeunesse qui s’est déroulé au Maroc sous le Haut Patronage de SM le Roi Mohammed VI.

Je vous laisse deviner, mais les plus perspicaces d’entre vous auront compris: « La délégation marocaine, (…) était dirigée par M. Driss Guerraoui, Conseiller auprès du Premier Ministre…« .

Mais, me demanderez-vous, rassurez-nous, Driss Guerraoui a-t-il également été présent à cette semaine de SM le Roi Mohammed Vi à Hawaii? Rassurez-vous, amis lecteurs: il l’a été, et de belle manière. Son talent de coordinateur, Driss Guerraoui l’a exercé de manière à combler les attentes, pourtant élevées vu la stature du personnage (et de sa pensée – « We have a popular monarchy« ), de celui l’ayant nommé à ce poste:

La semaine de SM le Roi Mohammed VI à Hawaii traduit une forme nouvelle de manifestation de l’appui, joint à l’admiration pour ce que le Maroc entreprend sur le plan démocratique, des droits de l’homme, de la modernisation économique, du progrès social et de l’ouverture sur les cultures et les civilisations du monde, a souligné M. Driss Guerraoui, Coordinateur de ce grand évènement organisé, du 28 novembre au 2 décembre à Honolulu.

Cette semaine exprime aussi un degré supérieur du niveau atteint par le partenariat stratégique entre le Maroc et les Etats-Unis, construit par touches successives depuis la reconnaissance par le Maroc en 1777 de l’indépendance des Etats Unis, a ajouté M. Guerraoui, également secrétaire général du Conseil économique, social et environnemental (CESE), dans un entretien à la MAP. (MAP)

Ce que des esprits superficiels estimeraient être une banale visite de jumelage à laquelle s’ajouterait un séminaire et un atelier d’artisanat, des esprits plus pénétrés du souffle de l’histoire – voire de la phénomènologie de l’esprit – savent en prendre la mesure, tel Hegel avant la bataille de Iéna voyant passer Napoléon Ier (« J’ai vu l’Empereur — cette âme du monde — sortir de la ville pour aller en reconnaissance ») et prévoyant la fin de l’histoire (Fukuyama n’a rien inventé). Sauf qu’avec Driss Guerraoui, ce n’est pas la fin de l’histoire, mais le commencement d’une nouvelle, du moins dans les relations entre Hawaii, la région Rabat-Salé-Zemmour-Zaer et le Maroc d’un Roi et d’un peuple marchant résolument de l’avant – pensez, le Maroc s’honore désormais d’un consul honoraire le représentant à Honolulu, et d’une association dénommée Friends of Morocco in Hawaii fondée par ledit consul.

C’est à ces moments-là que l’humble observateur de la chose publique que je suis sent que son modeste travail n’a pas été en vain. Quel est le rôle de l’individu dans l’histoire? L’histoire est-elle structurelle ou évenementielle? Des questions déjà balisées par Hegel, Marx, Arnold Toynbee et Fernand Braudel, et à laquelle l’observation de l’oeuvre infatigable de Driss Guerraoui permet dapporter une réponse qu’on espère définitive. Car que seraient les relations Hawaii-Maroc sans son abnégation? Si Hawaii ne s’était pas trouvée sur le chemin de Driss Guerraoui, quid des relations entre Hawaii et le Maroc? Supposons que ce soit la Virginie occidentale et sa classe moyenne ou le Mississippi et son péril noir qui se soient placées sur son chemin, que serait-il advenu des relations Hawaii-Maroc? Combien de délégations officielles marocaines auraient-elles visité la Virginie occidentale ou le Mississippi? Et quid des relations maroco-étatsuniennes, qui ont commencé piteusement par la reconnaissance des Etats-Unis nouvellement indépendants par le Maroc en 1777, pour atteindre l’apothéose de cette historique semaine à Honolulu, selon les dires mêmes – « un degré supérieur du niveau atteint par le partenariat stratégique entre le Maroc et les Etats-Unis, construit par touches successives depuis la reconnaissance par le Maroc en 1777 de l’indépendance des Etats Unis » – de Driss Guerraoui?

Certes, il y bien quelque contribuable aigri pour relever que Driss Guerraoui fut déjà de la mission de jumelage Hawaii – Région de Rabat-Salé-Zemmour-Zaer au mois d’avril de cette année, blog officiel de la chambre des représentants de l’Etat Hawaii faisant foi (2). La délégation officielle marocain d’alors, il y a donc sept mois, était à la hauteur de l’enjeu – outre l’ambassadeur du Maroc aux Etats-Unis, étaient également présents l’ex-secrétaire d’Etat à l’intérieur Saad Hassar et Ahmed Hajji, l’Agence pour la promotion et le développement économique et social des provinces du sud (dont on ignorait que les compétences géographiques recouvraient également Rabat, mais au diable l’avarice lorsqu’il s’agit d’aller à Honolulu défendre une cause nationale). Ne médisons pas: deux voyages par an à Hawaii aux frais de la princesse, ce n’est pas cher payé quand la coopération stratégique avec les Etats-Unis est en jeu. Et est-ce un hasard que quasiment chaque étape de la glorieuse histoire des relations bilatérales entre le Maroc et Hawaii – dont l’histoire chargée est brièvement résumée ici – aie connu la participation discrète mais décisive de Driss Guerraoui? Faisons le compte – en 1999, Driss Guerraoui dirigeait la délégation officielle marocaine au 1er Conrès mondial pour la jeunesse à Hawaii; en 2003, il coordonnait le 2e Congrès mondial se tenant à rabat, reçevant à cette occasion une importante délégation hawaiienne; la visite précitée de 2004; la signature du jumelage Hawaii-Rabat en mars 2012 et enfin cette historique semaine royale à Honolulu.

Napoléon I, pour revenir à lui, à certes créé le Conseil d’Etat, les lycées, le Code civil français, le Code pénal (toujours appliqué en Belgique) et convoqué le Grand Sanhédrin – mais de vous–à-moi, est-il populaire en dehors de Corse? Alors que Driss Guerraoui, sans faire couler de sang ni ruiner les relations extérieures du Royaume, réussit l’exploit – presque à bras nus – à créer des relations profondes entre Hawaii et le Maroc, moyennant quelques billets transatlantiques en première classe, quelques nuitées d’hôtel et quelques indemnités journalières. Mais, comme le dicte la sagesse populaire, on n’a rien sans rien.

Les ennemis de la patrie veillent cependant au grain: stipendiés par Alger, soutenus par Reporters sans Frontières, chiites clandestins ne jeûnant pas pendant le Ramadan et satanistes sionistes invétérés, certains groupuscules ont ourdi une sombre machination contre un policien hawaiien – de Honolulu plus précisément – natif de Casablanca, Michael Tarmoun, dont l’avis de recherche a été diffusé par Interpol. Ce brave garçon, marié, a été traitreusement piégé alors qu’il venait de secourir une prostituée désargentée et de lui offrir le gîte dans l’appartement de sa maîtresse (vous suivez?), allant jusqu’à lui offrir l’honneur de sa virilité ainsi qu’un billet de 5 dollars (une sadaqa sans doute). La prostituée n’ayant que peu apprécié cet honneur, le voilà qui fut condamné, encourant dix ans de prison pour viol. Heureusement, notre jeune héros a trouvé refuge au Maroc natal, et la patrie étant clémente et miséricordieuse, surtout envers les violeurs, il n’y a pas été inquiété par les autorités, d’autant qu’aucun traité d’extradition n’existe entre le Maroc et les Etats-Unis. Et les ennemis de la patrie en ont été pour leurs frais: rien de tout cela n’a entravé l’approfondissement historique des relations maroco-hawaiiennes.

Si toi aussi tu aimes voyager souvent avec tes copains pour Hawaii, fais comme moi, travaille pour le makhzen!

De cette semaine historique à Honolulu, on peut simplement déplorer l’absence remarquée et remarquable de la Fédération royale marocaine de jet-ski et de sport nautique ainsi que celle de Driss Ajbali. Dommage – pour Hawaii surtout, les Marocains ayant déjà le plaisir de mesurer l’étendue leurs compétences respectives.

(1) L’UNESCO est une organisation internationale, lesquelles n’ont pas de sections locales, tout au plus des délégations régionales (recouvrant plusieurs pays) , des bureaux ou missions de représentationauprès d’un Etat, ou des représentations permanentes (auprès d’autres organisations internationales). Il s’agit sans doute d’une section locale de l’association nationale US National Commission for UNESCO, ce qui n’est pas la même chose…

(2) Le site de la chambre des représentants de Hawaii reprend quelques documents à cet égard, dont la savoureuse liste des associations hawaiiennes ayant demandé que soit signé cet accord de jumelage, ainsi que les décisions de jumelage (ici et ici). Le gouverneur de l’Etat en parle ici.

Le vrai scandale Petraeus

C’est rare de lire ça dans la presse mainstream étatsunienne – ou même française ou suédoise, où la victoire de Barack Obama a été saluée comme l’apparition de l’imam caché. Mais voici David Rothkopf sur le site étatsunien Foreign Policy, qui cerne très exactement le problème avec le vrai-faux scandale de l’ex-général et ex-chef de la CIA, David Petraeus – ce n’est pas sa maîtresse, mais le programme d’assassinat par drones que mène notamment la CIA:

The real scandal here is that when the head of the CIA sleeps with someone who is not his wife, it causes a national scandal, but when the agency manages a drone program that serially violates the sovereignty of nations worldwide, that it helps formulate and then execute « kill lists » that make James Bond’s most egregious sprees of violence look a kindergarten birthday party, it does not.

Our values are, it seems, even more twisted than Bond’s. At least he is not so grotesquely hypocritical. It has long riled some among us that Congress thought it appropriate to impeach Bill Clinton over trivialities associated with his personal missteps, while never once challenging George W. Bush for the far greater misdeeds and very likely crimes associated with America’s invasion of Iraq. We seem to be a nation that can tolerate the violation of the law, the deaths of innocents, and the gross misallocation of national assets without blinking an eye — provided that the architects of such egregious wrongs keep their flies zipped.

Pour être honnête, ce n’est pas qu’aux Etats-Unis que des faits véniels, et généralement d’ordre privé, font démissionner présidents ou ministres, alors que des faits criminels liés à l’exercice du mandat politique ne le sont pas.

« One change we can begin to observe, though, is in the role of Jewish donors »

Phil Weiss (he’s behind the indispensable blog MondoWeiss, very critical of the United States’ pro-Israel policies) has repeated this often enough: the key factor behind the Jewish community’s influence in US politics is not so much electoral (although Jewish voters still play an important role in some swing states such as Florida) as financial – Jews figure prominently among the main donors of US politics. Since the US Supreme Court considered independent electoral expenditure from companies to be covered by the free speech rules of the US Constitution in a very controversial 2010 judgment (Citizens United v. Federal Election Commission), the role of money donations in US politics, already huge, is set to expand further.

Witness then the following consideration on the role of Jewish donors post-Citizens United, from The Jewish Daily Forward:

This remaking of the campaign finance system will reshuffle our politics in ways that no one can yet predict. One change we can begin to observe, though, is in the role of Jewish donors. They’ve long been a mainstay of Democratic politics. Their footprint on the GOP side is traditionally smaller. The super PAC phenomenon is already boosting Jewish donors’ importance in the Republican Party by several orders of magnitude.

The Forward’s Josh Nathan-Kazis reported in March on Jewish giving to the biggest super PAC, the pro-Romney Restore Our Future, which had raised a total of $36 million at the time (as of April 23 it’s reached $52 million). At the time, he reported, Jews had provided about 10% of the PAC’s total revenues.

Moreover, he noted, several of the pro-Romney PAC’s Jewish donors were former Democratic donors who switched sides this year, presumably because of disenchantment with the president. If that continues and becomes a trend, it will have serious implications for the future.

Scanning the broader super PAC field, the impact is even more striking. Of 25 Republican super PAC donors who have given $1 million or more, four or five are Jewish (depending on whether you count Sheldon and Miriam Adelson separately, as the FEC and IRS do). The Adelsons, in fact, are the largest single donors in American politics, accounting for a total of $26.5 million in gifts in this campaign between the two of them and their three daughters. Most of their gifts, $21.5 million, went to the pro-Gingrich Winning Our Future PAC. The other $5 million went to the pro-GOP Congressional Leadership Fund.

Three other Jewish GOP donors gave $1 million each: hedge fund operators Paul Singer and John Paulson to the pro-Romney PAC and bingo king Irving Moskowitz to Karl Rove’s American Crossroads. Another three Jewish donors gave between $1 million and $2 million each to Democratic super PACs: movie mogul Jeffrey Katzenberg, real estate investor Amy Goldman and hedge fund operator James Simons.

This makes for a double-blow to the Democrats. On one hand, the super PACs’ potential benefit to Republicans seems incalculable. Only 10% of Forbes magazine’s 400 wealthiest American billionaires had given by late March. Another 360 wait to be tapped.

No less alarming, Republicans are faring better than Democrats among wealthy Jews (including those giving less than $1 million). That’s unprecedented.

And if Obama manages to make up the shortfall through small online donations, a feat he mastered in 2008, what are the implications for Jewish influence in the Democratic Party?

On the other hand, what if these new Jewish mega-donors become a force within the GOP? Most of them appear to be entrepreneurs and investors alienated by Obama’s fiscal policies. Many are outspokenly progressive on issues like abortion, gay rights and the environment. If they end up gaining the clout their donations suggest, then liberals might have to rethink their fear and loathing of the other party. Watch the money. (Forward.com)

What this portends for US politics in the Middle East, and on Palestine, is another matter – there are other constituencies to accommodate, such as the evangelical voters (pro-Israeli for religious reasons) and the oil lobby – not to mention the slump in US influence in the region evident during the 2011 Arab spring. More importantly, the cracks within the Jewish community are getting wider: apart from J-Street, seen as a liberal (in the US sense) competitor to AIPAC, the internal criticism of the blindly pro-Israel slant of US diplomacy in the Middle East has seldom been stronger, with even mainstream media talking heads – Thomas Friedman and Peter Beinart are the latest ones – stepping out of line. And many of the most vocal critics of Israel and supporters of the BDS movement are from within the Jewish community – Phil WeissGlenn GreenwaldMax BlumenthalNaomi Klein (she’s Canadian), not to mention Noam Chomsky and Norman Finkelstein, who are not in favour of BDS.

One last comment: one has to commend a Jewish community paper like Forward for writing such a candid article. You will not be reading anything resembling that in the NYT or the WaPo anytime soon – not to mention the European press, where the understandable reluctance to use themes  – such as that of « Jewish money » – regrettably reminescent of the 30’s has stifled even  descriptive, balanced and nuanced media work on the political role of some Jewish operators – in France for instance, more space is devoted to Muslim umbrella groups UOIF and CFCM, and less compunction is displayed when writing about them, than to their Jewish counterpart CRIF. Let’s hope an evolution is under way for casual discussion of issues related to Jews and Muslims, without falling into the twin traps of anti-semitism and islamophobia.

Les Pakistanais, de grands enfants

Quand l’homme blanc écoute la complainte de l’indigène, y compris avec une certaine sympathie (« The Pakistanis Have a Point« ), c’est pour s’entendre confirmer ce dont il se doutait déjà:

As an American visitor in the power precincts of Pakistan, from the gated enclaves of Islamabad to the manicured lawns of the military garrison in Peshawar, from the luxury fortress of the Serena Hotel to the exclusive apartments of the parliamentary housing blocks, you can expect three time-honored traditions: black tea with milk, obsequious servants and a profound sense of grievance.

Talk to Pakistani politicians, scholars, generals, businessmen, spies and journalists — as I did in October — and before long, you are beyond the realm of politics and diplomacy and into the realm of hurt feelings. Words like “ditch” and “jilt” and “betray” recur. With Americans, they complain, it’s never a commitment, it’s always a transaction. This theme is played to the hilt, for effect, but it is also heartfelt.

The thing about us,” a Pakistani official told me, “is that we are half emotional and half irrational.”

CQFD – nul doute que si l’armée pakistanaise tuait 24 soldats étatsuniens lors d’un bombardement au Nouveau-Mexique le gouvernement étatsunien réagirait avec le rationalisme cartésien qu’on lui connaît.

Fahd Yata, le 20 février, les Etats-Unis et l’OTAN: faites ce que je dis, pas ce que je fais

Sincèrement, j’aime bien Fahd Yata – tout comme j’aime bien Khalid Naciri et Khalil Hachimi Idrissi – ils me font presque oublier Moulay Ahmed Alaoui. Non, je ne suis pas sous l’influence de produits que la morale réprouve, ni en instance de demande de grima. Voici le comment du pourquoi.

Cet éditorialiste et propriétaire de l’hebdomadaire La Nouvelle Tribune (sincèrement, je ne peux pas me rappeler avoir jamais vu quelqu’un l’acheter dans un kiosque ou le lire dans un café ou dans le train), fils d’Ali Yata et frère jumeau du regretté Nadir Yata, a une ligne éditoriale identique à celle de tant d’autres éditorialistes ou bloggeurs, mais lui l’affirme avec constance et détermination depuis une quinzaine d’années: le Roi a toujours raison et ceux qui critiquent le makhzen ou demandent une démocratisation du système ont toujours tort.

C’est un éditorialiste et homme de presse d’un genre particulier – il s’est ainsi vanté dans un tweet de ne pas avoir de carte de presse:

S’agissant du mouvement contestataire du 20 février, sa religion est toute faite: il s’agit là d’un mouvement extrémiste, manipulé par l’étranger (lequel?) et Moulay Hicham, et insignifiant – des « bouffons » comme il l’a écrit dans un éditorial du 11 février…

Pis encore: dans un article récent, il écrit ainsi que « des réseaux sociaux, sous emprise américaine, actionnent le #FEB 20 au Maroc« . Ca amusera sans doute Nahj addimoqrati, d’Al adl wal ihsan ou du PSU, dont de nombreux militants participent activement au 20 février, que ce sont des suppôts des Etats-Unis – de la CIA pour dire les choses crûment. Des esprits pervers s’étonneront de voir reprocher au 20 février des accointances avec des officines du gouvernement étatsunien alors même que l’Etat marocain et ses médias publics ou officieux n’ont cessé de rappeler à quel point Hillary Clinton et son State Department étaient transportés d’enthousiasme tant par le référendum que par le texte constitutionnel et muets de béatitude devant « l’exception marocaine« .

Ainsi dans cet édito en date du 3 mars 2011:

M.William Burns n’est pas le premier venu. Sous-Secrétaire d’Etat, c’est-à-dire Vice-Ministre des Affaires Étrangères des Etats-Unis d’Amérique, il est le premier diplomate « professionnel » de son pays, juste en dessous de Mme Hilary Clinton, qui occupe, elle, un poste éminemment politique, aux côtés du Président Obama. M. Eneko Landaburu, ambassadeur de l’Union européenne à Rabat et représentant de sa Commission de Bruxelles, est, pour sa part, un diplomate chevronné, qui a longtemps été le premier responsable des affaires étrangères au sein de ladite commission, juste après le Commissaire européen, avant de prendre un poste parmi les plus recherchés par les Eurocrates, celui de Rabat. Quant au Washington Post, c’est, avec le New York Times, l’un des deux quotidiens les plus influents d’Amérique, connu pour la qualité et la pertinence de ses éditoriaux, le sérieux de ses analyses, l’impact de ses articles. (…)

Si les deux « grands encadrants » du Royaume, Etats-Unis et Union Européenne, par l’entremise de voix autorisées et habilités à le faire, ont ainsi relevé l’exception marocaine, c’est qu’elle existe vraiment… (…) Plutôt que de cracher dans la soupe, tirer sur les ambulances, miner le tissu politique, déstabiliser un gouvernement, ô combien imparfait certes, mais élu démocratiquement, ne serait-il pas préférable d’agir, de mobiliser et de convaincre pour aller de l’avant, en préservant les acquis ? Burns, Landaburu, la presse étrangère, ne sont pas les soutiens indéfectibles du régime. Leurs intérêts commandent qu’ils attestent de la réalité. Serait-il impossible que certains des Marocains, privilégiés de surcroît, en fassent de même ?

La constance étant le propre des seuls imbéciles, La Nouvelle Tribune allait donc publier, ce 7 juillet, cet article précité sur les accointances étatsuniennes des réseaux sociaux soutenant le mouvement du 20 février – « Des réseaux sociaux, sous emprise américaine, actionnent le #FEB 20 au Maroc« :

Il apparaît ainsi clairement que la diplomatie officielle américaine, celle qui prône, à juste titre, l’instauration de la démocratie, le respect des droits fondamentaux de l’Homme, la liberté, partout dans le monde (y compris dans l’aire arabo-islamique, comme le confirme le discours fondateur d’Obama au Caire le 5 juin 2009), et que dirige Mme Hilary Clinton, est largement épaulée, (le moins que l’on puisse reconnaître) par une diplomatie parallèle, directement inspiratrice des mouvements activistes juvéniles en maints endroits de la planète et mise en oeuvre à partir des réseaux sociaux précités. Pour ce faire, un site fondateur a été créé, « movements.org » qui organise la mobilisation par pays ou région, fabrique des stars ou des leaders (tel le cyberactiviste Wael Ghoneïm en Égypte), lance des mots d’ordre de mobilisation, prodigue des conseils organisationnels et se fait l’écho immédiat des activités et actions des mouvements qu’il a contribués à créer. Bien évidemment, notre cher pays, le Maroc, figure en bonne place dans les desseins de ces « deus ex machina » de la cybernétique américaine. « movements.org » a régulièrement rendu compte des activités du #FEB 20 et reproduit largement tous ses appels, ses commentaires, ses attaques contre le « Makhzen ». Lors de la campagne référendaire sur le projet de révision de la Constitution, le réseau-mère des activistes du 20 février, basé donc aux Etats-Unis, a pris fait et cause pour le boycott et dès le 2 juillet, reprenait en large titre, les critiques et les accusations portées par une fraction du 20 février contestant la régularité du scrutin et souhaitant la relance de la contestation dans les rues du Royaume. (…)

Ainsi, comme on peut le constater en prenant connaissance des liens organisationnels qui existent entre le mouvement du 20 février marocain et les opérateurs de la contestation mondiale basés aux Etats-Unis, l’Administration Obama, qui s’entoure désormais dans ses déplacements officiels des « patrons » des principaux réseaux sociaux mondiaux, pratique une double démarche, qui consiste d’une part à apporter un soutien officiel à l’Etat marocain et, d’autre part, à manipuler et encourager des activistes de tous bords afin de « maintenir la pression sur le Makhzen » pour reprendre une expression à la mode chez les #FEB 20 et ceux qui les conseillent localement. En langage non diplomatique, cela s’appelle du double jeu et de l’hypocrisie… Cela implique donc, de la part de tous ceux qui se sentent concernés par l’avenir démocratique du Maroc, lequel se construit et se construira ICI, de prendre la mesure de cette immixtion clandestine américaine, mais surtout, de considérer Facebook, Twitter et autres comme des instruments de communication qu’il convient d’utiliser avec intelligence, diligence, et EN PERMANENCE.

Pour faire court: les partisans du mouvement du 20 février sont manipulés par Langley.

Mais rappelez-vous, je vous disais que la constance est le propre des seuls imbéciles: c’est ainsi que La Nouvelle Tribune, hebdomadaire dirigé par Fahd Yata, a vu un de ses journalistes invité par l’OTAN, et ce le 2 février 2011, en compagnie d’une brochette de journalistes marocains, comme en atteste ce document de cette organisation. Chacun qui connaît ce type d’opérations sait que le déplacement et les frais de séjour sont généralement payés par l’hôte – je serais surpris mais heureux d’apprendre que La Nouvelle Tribune aurait enfreint cette pratique en payant intégralement le voyage et les frais de séjour de son journaliste. Il ne s’agissait pas de couvrir un événement particulier, mais plutôt, à en croire le programme de cette journée, d’inviter des journalistes marocains afin de diffuser la bonne parole de l’OTAN et d’influencer ainsi la presse marocaine, du moins celle qui s’est prêtée à cette opération. On notera avec satisfaction que le secrétaire-général de l’OTAN, l’ex-premier ministre danois Anders Fogh Rasmussen, le même qui avait refusé de rencontrer une délégation d’ambassadeurs arabes lors de la crise dite des caricatures danoises, a ici trouvé le temps de rencontrer ces sommités de la farouche presse indépendante marocaine (parmi lesquels on comptait notamment des journalistes du Matin du Sahara, de la MAP, de L’Opinion, de Libération, de Bayane al Yaoum, d’Al Alam et de Medi 1 Sat).

Ne croyez pas que cette visite ait changé quoi que ce soit à l’incorruptible indépendance d’esprit qui est la marque de fabrique de la Nouvelle Tribune. A peine son journaliste – Zouhair Yata – revenu de Bruxelles, que l’on a eu droit à une analyse dont l’indépendance d’esprit échappera aux seuls esprits bornés: « Maroc-OTAN, un partenariat stable et fort, unique sur la Rive Sud« . Florilège:

Le Maroc, qui fut un partenaire stratégique de l’OTAN tout au long de la guerre froide, participe activement à ce dialogue politique depuis 1995 et en tire une forte crédibilité auprès de cette organisation internationale. (…) Le cas du Maroc, en tant que pays non membre, reste exceptionnel et témoigne, n’en déplaise à Wikileaks, du professionnalisme de l’armée marocaine qui devrait prochainement s’engager activement dans l’Opération « Active Endeavour » de sécurisation de la Méditerranée aux côtés de l’OTAN. (…)

Le nouveau concept stratégique de l’OTAN, adopté par les chefs d’Etat et de gouvernements à Lisbonne en novembre dernier, a été l’occasion pour le Maroc de faire entendre sa voix. En effet, dès janvier 2010, les autorités marocaines ont organisé un séminaire sur le « Dialogue méditerranéen et le Nouveau Concept Stratégique de l’OTAN » sous la présidence du Secrétaire Général du Ministère des Affaires Étrangères et de la Coopération, MAEC, M.Youssef Amrani, et du Secrétaire Général Délégué de l’OTAN. D’ailleurs, les plus hauts responsables de l’Alliance, le Secrétaire général Rasmussen en tête, ont affirmé lors de ce voyage de presse que les recommandations émanant du Maroc pour le renforcement et la dynamisation du dialogue politique avec les partenaires de l’OTAN, ont été non seulement écoutées, mais concrètement prises en compte lors de l’élaboration du nouveau concept stratégique. En définitive, à l’image de son statut avant-gardiste de partenariat avec l’Union européenne, le Maroc tisse une relation de confiance avec l’OTAN depuis de nombreuses années. Cette relation privilégiée permet au Royaume d’être associé à la réflexion et à l’élaboration des politiques sécuritaires de demain et de collaborer à un dialogue politique crucial pour la paix. Force est de constater que seul un pays bénéficiant d’une réelle stabilité peut prétendre à être un partenaire aussi durable d’une organisation telle que l’OTAN. Et il est important de noter qu’aucun pays de la Rive Sud de la Méditerranée n’est en mesure de concurrencer le Maroc dans ce domaine, tant la relation que nous entretenons avec l’Alliance est basée sur un respect et une considération mutuels. Le Maroc peut donc compter sur un appui de taille pour l’aider à faire face, par la formation et l’entraînement de ses forces armées notamment, aux enjeux sécuritaires que sont le terrorisme sahélien ou le trafic de drogues et de personnes.

L’indépendance d’esprit est innée ou n’est pas, puisque La Nouvelle Tribune allait continuer à soumettre l’OTAN à une critique rigoureuse, comme dans cette tribune d’un ancien diplomate étatsunien publiée dans La Nouvelle Tribune du 30 juin, « L’OTAN doit prévaloir« .

Une carte de presse, pour quoi faire? Bonne question.

AIPAC publie ses instructions au Congrès US

Via ce billet de MJ Rosenberg, consacré à AIPAC et aux révolutions arabes, j’ai trouvé ce document public, intitulé « AIPAC Briefing Book – 111th Congress, second session« . Daté de septembre 2010, il ne tient bien évidemment pas compte des révolutions arabes de ce début 2011.

Comme l’explique MJ Rosenberg, il y a trois bonnes raisons de suivre de près les prises de position publiques d’AIPAC:

There are three reasons why monitoring AIPAC (the American Israel Public Affairs Committee) is a valuable use of time for anyone following events in the Middle East.

The first is that AIPAC faithfully reflects the positions of the Netanyahu government (actually it often telegraphs them before Netanyahu does).

The second is that AIPAC’s policies provide advance notice of the positions that will, not by coincidence, be taken by the United States Congress.

And third, AIPAC provides a reliable indicator of future policies of the Obama administration, which gets its « guidance » both from AIPAC itself and from Dennis Ross, former head of AIPAC’s think tank, the Washington Institute for Near East Policy, and now the president’s top adviser on Middle East issues.

On a déjà vu un exemple des préoccupations majeures d’AIPAC, répercutées par la Maison Blanche, concernant l’Egypte – cf. « Egyptian Democracy Must Resist Extremism, Maintain Peace with Israel« :

  • « Rushing to elections could help the election prospects of the Muslim Brotherhood« ;
  • « The United States has made clear that the amended Egyptian constitution must ensure safeguards against undemocratic forces. « They must make absolutely clear that no political party can be committed to the overthrow of the government, can be unwilling to support an inclusive society, including Christians, women, and others, » Secretary of State Hillary Clinton said recently.« ;

Le plus marrant c’est ce paragraphe-ci, qui dit en gros que les Egyptiens sont libres de décider de leur politique du moment qu’ils choisissent celle du Likoud:

While only the Egyptians can form their own government, the United States should insist on several goals for the next Egyptian government to meet.

  • Egypt should maintain the peace treaty with Israel, including the demilitarization of the Sinai Peninsula and permission for the continued presence of the U.S.-led Multinational Force and Observers in the Sinai.
  • Egypt should adhere to other contractual obligations to Israel, particularly continuing the supply of natural gas.
  • Egypt must maintain its policy of isolating Hamas in Gaza.
  • Egypt should continue to oppose Iran’s efforts to expand its regional influence – both directly and through Hizballah and Hamas.
  • Egypt must continue to oppose the global jihad of al-Qaeda and its affiliates.Egypt must keep the Suez Canal open to all shipping, including the passage of Israeli civilian and military vessels.

Je vous laisse deviner ce qu’a dit Clinton au Caire

« La législation tunisienne dans le domaine des droits de l’homme est déjà largement conforme aux standards internationaux »

Si, si, c’est vrai, puisque c’est écrit ici, en dépit des critiques nihilistes de quelques esprits chagrins:

Herman van Rumpoy, président de l'Union européenne, serre la main à Ben Ali, sous le regard attendri du Guide suprême

En matière de démocratie et de droits de l’homme, le dialogue dans le cadre du sous-comité spécifique prévu en 2009 a eu lieu après la période de référence, en février 2010. Les objectifs fixés par le Plan d’action, notamment en matière des libertés d’association et d’expression, n’ont pas été atteints, ce qui confirme la nécessité de renforcer le dialogue et la coopération dans ce domaine entre la Tunisie et l’UE. La réforme de la justice reste un défi à relever pour asseoir durablement l’État de droit, élément essentiel d’un véritable rapprochement avec l’UE. (p. 2)

En matière de lutte contre la corruption, aucun événement significatif n’est à signaler par rapport à 2008. (p. 3)

La législation tunisienne dans le domaine des droits de l’homme est déjà largement conforme aux standards internationaux. Il existe néanmoins un décalage persistant entre les positions officielles de soutien aux libertés fondamentales et au respect des droits de l’homme et l’application concrète des lois. (p. 3)

En ce qui concerne les conditions de vie carcérale et les droits des détenus, la Tunisie a adopté des mesures visant à faciliter la réinsertion des anciens détenus et à appliquer des peines alternatives à la prison, mais des progrès restent à faire. Le coordinateur général tunisien des droits de l’homme a le droit d’effectuer des visites imprévues dans les prisons. (p. 4)

La Tunisie continue à faire preuve d’une politique étrangère de modération et d’unité dans les diverses enceintes internationales avec une attention particulière attribuée aux affaires régionales et notamment au conflit israélo-palestinien. (p. 5)

La Tunisie a poursuivi ses efforts en matière de contrôle des frontières et de lutte contre l’immigration irrégulière, et s’est dotée des équipements et infrastructures nécessaires pour un contrôle de qualité. L’adoption des nouveaux passeports à lecture optique permet de renforcer la répression des délits liés au trafic des clandestins et l’infrastructure aux points de contrôle des frontières correspond aux normes internationales. (p. 12)

Comme en 2008, la Tunisie a poursuivi ses efforts dans l’application des mesures de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme au sein des institutions financières. La mise en oeuvre d’un régime de contrôle efficace dans les banques s’est renforcée. Une commission spécialisée en lutte contre le blanchiment d’argent a été créée en 2009 et présenterait un rapport début 2010. La Tunisie a demandé l’adhésion au Groupe Egmont. (p. 13)

L’enveloppe financière de l’Instrument européen de voisinage et de partenariat (IEVP) allouée à la Tunisie dans le cadre du programme indicatif national 2007-2010 s’élève à 300 millions d’euros auxquels se sont ajoutés 30 millions d’euros complémentaires en 2007 (pour le programme d’appui à la gestion budgétaire par objectifs). (p. 18)

Soyons honnêtes – de l’autre côté de l’Atlantique, on a partagé – en public, mais pas dans les cables diplomatiques à usage interne – la même analyse:

« Rumsfeld described Tunisia as a moderate country and a democracy » (Al Jazeera)

Mais ceci serait incomplet sans la finesse d’analyse du locataire du Palais de l’Elysée:

L’un de nos plus grands auteurs, FLAUBERT disait, avec une certaine justesse, qu’en Tunisie le climat est si doux que l’on oublie d’y mourir… À travers l’Histoire, qui n’a succombé aux charmes de cette Tunisie ? (…)

Je sais, Monsieur le Président, le prix que vous attachez au dialogue des civilisations. Une chaire de l’université de Tunis porte votre nom pour permettre à de grands esprits arabes et européens de se rencontrer, d’échanger et de bâtir dans ce respect mutuel sans lequel il n’y aurait ni paix ni harmonie, ce dialogue indispensable (…)

Pour que les civilisations se rencontrent, pour que les Hommes se parlent, il faut la confiance. À ceux qui pensent que l’humanisme est une invention occidentale et qui regardent donc les autres avec un peu de suffisance, je veux rappeler que Tunis a aboli l’esclavage en 1846, deux ans avant Paris, et que la Tunisie fut, en 1861, le premier pays arabe à se doter d’une constitution. Plus tard, le président Bourguiba a fait, le jour même de l’indépendance de votre pays, un double choix fondamental : celui de la modernité pour les Tunisiens, femmes et hommes, et celui de l’amitié avec la France. (…)

Signataire des grandes conventions des Nations unies, votre pays s’est engagé dans la promotion des droits universels et des libertés fondamentales, en respectant — et, Monsieur le Président de la République, j’y suis très sensible parce que c’est une question qui m’a toujours passionné — un moratoire strict sur la peine capitale, à laquelle naturellement j’ai toujours été opposé à titre personnel. Aujourd’hui, l’espace des libertés progresse. Ce sont des signaux encourageants que je veux saluer et qui font écho à ce que disait déjà feu le président Bourguiba lorsqu’il confiait : « Je suis réaliste. Être réaliste, c’est préférer une réforme modeste, qui en permet une autre, à un miracle impossible. » Je sais d’où vous venez, Monsieur le Président de la République, d’où vient la Tunisie et la Tunisie peut se comparer sans rougir à tant d’autres pays. Ces signaux, ces réformes s’inscrivent sur un chemin, étroit et difficile, mais essentiel, celui de la liberté et du respect des individus sans lesquels un pays n’est pas un grand pays. Ce chemin, aucun pays ne peut prétendre l’avoir entièrement parcouru et personne ne peut se poser en censeur. Je viens d’un continent dont l’histoire, y compris l’histoire récente, recèle des tragédies abominables et je ne vois pas au nom de quoi je me permettrais, dans un pays où je suis venu en ami et qui me reçoit en ami, de m’ériger en donneur de leçons. J’ai pleinement confiance dans votre volonté de voir continuer à élargir l’espace des libertés en Tunisie. Nous en avons parlé vous et moi. (2008)

Mais tout est bien qui finit bien: l’Union européenne, les Etats-Unis et la France ont désormais courageusement salué la chute de l’ex-président Zine el Abidine Ben Ali…

Un autre argument pour le tourisme au Maroc: l’absence d’accords d’extradition avec les Etats-Unis et Israël

Avec beaucoup de retard je suis tombé sur l’histoire de l’escroc étatsunien Scott Rothstein, avocat véreux condamné récemment à 50 années de prison pour escroquerie – il avait monté ce qu’on appelle en anglais un « Ponzi scheme« , une sorte d’escroquerie en cascade.

Cherchant à échapper à la justice étatsunienne, il s’était enfui au Maroc, et pas seulement pour faire du tourisme. En effet, il n’y a aucun traité d’extradition entre le Maroc et les Etats-Unis, et c’était là sa motivation principale pour y venir:

Rothstein pleaded guilty last month, probably in part because it is difficult to come up with an innocent explanation for why you “wired $16 million to an offshore account and fled to Morocco in a private jet” if you haven’t been up to something. He faces up to 100 years in jail, where the toilets are stainless steel. Although maybe putting his ass in jail will change that.

Why Morocco, and the followup question, why in the world did the guy come back? Good questions.

Not coincidentally, Morocco is one of the countries that has no extradition treaty with the United States, something that Rothstein knew because — and this is possibly my favorite detail of the whole story, short of the golden toilets – he made somebody in his firm research that issue for him. The project was supposedly on behalf of a “client,” but he was in fact having someone research the question of where he should flee to avoid prosecution.

I was sort of hoping he called in an associate and just made that person do it, but it turns out he sent an email, apparently to everyone in the firm (Rothstein, Rosenfeldt and Adler law firm in downtown Fort Lauderdale), saying he had a rush project for an important client. “We have a client that was a United States citizen until about 6 months ago,” Rothstein wrote in the email, probably able to resist making air quotes around “client” only because he was busy typing the word. “He became a citizen of Israel and renounced his United States citizenship. He is likely to be charged with a multitude of crimes in the United States including fraud, money laundering and embezzlement.” (I’m trying to imagine what people at the firm were thinking upon reading this.) Rothstein wanted them to research whether the client could be extradited from Israel, or could be prosecuted for the crimes in Israel. “This client is related to a very powerful client of ours,” Rothstein continued, “and so time is of the essence. Lets [sic] rock and roll….there is a very large fee attached to this case. Thanks Love ya Scott,” he concluded.

Rothstein, un juif pratiquant pouvant apparemment invoquer la discriminatoire loi du retour israëlienne à son bénéfice, s’était également enquis auprès des avocats de son cabinet sur les possibilités d’éviter les poursuites en cas d’ontention de la nationalité israëlienne et de résidence dans ce pays – la réponse de ses avocats fut négative:

In the e-mail exchange before he left, Rothstein went on to ask whether « the client » could be extradited to the U.S. and if he could be charged with those crimes in Israel even if they were committed here. He also asked for any U.S. or Israeli attorneys who could assist.
(…)
The attorneys responded quickly with advice that a person could be extradited and that a recently-granted Israeli citizenship could be revoked on the grounds that it was obtained to evade prosecution. The lawyers also warned that the client could be charged in Israel « if he has a cent in that country. »

Pour pousser un acteur clé de la scène politique de Floride à un exil à Casablanca, il fallait vraiment que sa situation soit désespérée.

Juste avant de partir en douce pour le Maroc le 27 octobre 2009, il avait effectué un virement de 18 millions de dollars sur un compte en banque marocain.

Mais pourquoi diantre a-t-il alors quitté le Maroc pour retourner se livrer à la justice étatsunienne le 3 novembre 2009 (voir le plan de vol ici)? Ce n’est pas très clair à ce stade.

L’absence de traité d’extradition entre le Maroc et les Etats-Unis est un fait – mais dans un Etat comme le Maroc qui n’est pas un Etat de droit et où la justice n’est pas indépendante, on doute que cela constitue une garantie en béton. Outre que le Maroc a ces dernières années eu pour pratique d’accepter la remise illégale (« illegal or extraordinary rendition« ) d’étrangers par les Etats-Unis (Binyam Mohamed ou Ramzi Binalshibh par exemple) afin qu’ils soient torturés au Maroc – mais il s’agit alors de terrorisme, et pas de crimes financiers, la loi marocaine permet l’extradition d’étrangers même en cas d’absence de convention d’extradition bilatérale.

Il faut se reporter à cet égard au Code de procédure pénale (CPP), lequel dispose en son article 718 alinéa 1 ce qui suit:

La procédure d’extradition permet à un Etat étranger d’obtenir de l’Etat marocain, la remise d’un inculpé ou condamné non ressortissant marocain qui, étant l’objet d’une poursuite intentée au nom de l’Etat requérant ou d’une condamnation prononcée par une de ses juridictions de droit commun, est trouvé sur le territoire du Royaume.
Néanmoins, l’extradition n’est accordée que si l’infraction, cause de la demande a été commise :
– soit sur le territoire de l’Etat requérant par un ressortissant de cet Etat ou par un étranger; (…)

Ces conditions étaient remplies par Scott Rothstein lors de son bref séjour marocain, lui-même étant ressortissant étatsunien poursuivis pour des faits accomplis sur le territoire étatsunien.

Autres conditions posées, à l’article 720 du CPP:

Les faits qui peuvent donner lieu à l’extradition, qu’il s’agisse de la demander ou de l’accorder, sont les suivants :
1- tous les faits punis de peines criminelles par la loi de l’Etat requérant ;
2- les faits punis de peines délictuelles privatives de liberté par la loi de l’Etat requérant, quand le maximum de la peine encourue, aux termes de cette loi, est d’au moins un an et au dessus, ou, s’il s’agit d’un condamné, quand la peine qui lui a été infligée par une juridiction de l’Etat requérant est d’une durée égale ou supérieure à quatre mois.
En aucun cas, l’Etat marocain n’accorde l’extradition, si le fait poursuivi n’est pas réprimé par la loi marocaine d’une peine criminelle ou délictuelle.

Cet article exprime le très classique principe de la double incrimination, selon lequel un Etat extradie un étranger vers un autre Etat que si les infractions pour lesquelles l’extradition est demandée sont punissables dans l’ordre juridique des deux pays – en clair, le Maroc dans ce cas ne peut extrader une personne poursuivie pour des faits qui ne sont pas réprimés par la loi pénale marocaine. En l’occurence, les faits pour lesquels Scott Rothstein a été poursuivi sont au nombre de 5 en droit étatsunien: « racketeering conspiracy » (difficile à traduire, probablement « conspiration en vue d’extorsion de fonds, d’escroquerie ou de fraude »), « money laundering conspiracy » (« conspiration en vue du blanchiment d’argent »), « mail and wire fraud conspiracy » (« conspiration en vue de commettre de la fraude par le truchement de correspondance postale ou par moyens de télécommunication ») et enfin « wire fraud » (« fraude par le truchement de moyens de télécommunication »). Les éléments constitutifs de certaines de ces infractions pourraient à première vue correspondre à l’association de malfaiteurs (articles 293 et 294 du Code pénal marocain), à l’escroquerie (article 540 du Code pénal), à l’abus de confiance (article 547 du Code pénal) ou encore à du blanchiment de capitaux (articles 574-1 à 574-3 du Code pénal).

Aucun des obstacles à l’extradition recensés à l’article 721 du CPP ne s’appliquait non plus:

L’extradition n’est pas accordée :
1- lorsque l’individu objet de la demande est un citoyen marocain, cette qualité étant appréciée à l’époque de la commission de l’infraction pour laquelle l’extradition est demandée ;
2- lorsque l’infraction pour laquelle elle est demandée est considérée par l’état marocain comme une infraction politique ou connexe à une telle infraction.
Cette règle s’applique, notamment, si l’état marocain a des raisons sérieuses de croire que la demande d’extradition, apparemment motivée par une infraction de droit commun, a été en réalité présentée aux fins de poursuivre ou de punir un individu pour des considérations de race, de religion, de nationalité ou d’opinions politiques, ou risque d’aggraver la situation de cet individu pour l’une ou l’autre de ces raisons.
Toutefois, l’attentat à la vie du Chef de l’état, d’un membre de sa famille ou d’un membre du gouvernement, ne sera pas considéré comme pouvant faire l’objet des restrictions prévues aux deux alinéas précédents.
Il en sera de même des actes commis au cours d’une insurrection ou de troubles à l’ordre public, lorsqu’ils constituent des actes de barbarie odieuse, des génocides ou des actes de vandalisme interdits par les conventions internationales.
3- lorsque les crimes ou délits ont été commis sur le territoire du Royaume ;
4- lorsque les crimes ou délits, quoique commis hors du territoire du Royaume, y ont cependant été poursuivis et jugés définitivement ;
5- lorsque la prescription de l’action publique ou de la peine est acquise antérieurement à la demande d’extradition, d’après la législation marocaine ou celle de l’Etat requis, et d’une façon générale toutes les fois que l’action publique de l’Etat requérant sera éteinte ou prescrite.

Les Etats-Unis auraient donc pu demander l’extradition de Scott Rothstein, nonobstant l’absence d’une convention bilatérale d’extradition, sous réserve du respect des conditions de fond et de forme énoncées aux articles 718 à 745 du CPP – l’avis favorable de la Cour suprême aurait été requis, mais sans doute pas excessivement difficile à obtenir. Rothstein ne bénéficiait donc d’aucune garantie juridique quant à sa non-extradition.

Autre raison pour quitter le Maroc et se livrer à la justice étatsunienne – Scott Rothstein n’a pas du tout, mais pas du tout aimé le Maroc, selon le garde du corps Bob Scandiffio qui l’avait rejoint quelques jours à Casablanca:

I asked him if Rothstein indicated whether he had asked his wife, Kim, to come to Morocco.

« He said that Kim would never have went over there, » said the bodyguard. « He said she wouldn’t move over there and leave her family. Morocco is a filthy and dirty place. I wouldn’t live over there either. »

Rothstein l’a déclaré lui-même à un journaliste:

Trying to find an acceptable topic, I asked Rothstein how he liked Morocco.

« I hated it, » he said.

Le sens de l’accueil légendaire des différents services de l’aéroport Mohammed V de Casablanca avait déjà frappé Rothstein dès son arrivée:

The trip was stressful; he said he was stuck at the airport in Casablanca for six hours after arriving. « I thought, ‘What have I gotten myself into here?’ The whole time I was there, I didn’t feel right. It was like I was on drugs; nothing felt real. »

C’est marrant, il m’arrive aussi de penser la même chose quand je débarque à Casablanca de l’étranger…

Rothstein n’a pas débarqué au Maroc en solitaire. Il était accompagné d’un certain Stephen Caputi, patron de boîte de nuit à Palm Beach, titulaire d’un compte bancaire au Maroc doté d’un million de dollars US:

Add another member to Scott Rothstein’s unofficial Moroccan club — Cafe Iguana owner and longtime Rothstein associate Stephen Caputi.

Caputi joins Rothstein’s « uncle, » a former bodyguard, and a Moroccan-born guide to the list of those who traveled to Morocco during Rothstein’s weeklong stay after he fled to the country when his $1.2 billion Ponzi scheme collapsed.

We already knew that there was a $1 million bank account in Casablanca with Caputi’s name on it. The money is being seized by the federal government. This mini-bombshell leads to many questions for Caputi, who of all of Rothstein’s close associates seems to be discussed the least. Chiefly, why did Rothstein ask him to fly out to Morocco? Another key question: What did he do for Rothstein, if anything, while he was there?

Ne faut-il pas être résident au Maroc, ou Marocain résidant à l’étranger, pour pouvoir ouvrir un compte en banque au Maroc? Et on peut aussi se demander s’il ne faudrait pas instaurer la réciprocité en matière de visas, afin d’éviter une certaine faune…

Ceci dit, Rothstein avait peut-être d’autres raisons de vouloir quitter le Maroc avec une telle hâte: selon des rumeurs, il aurait recueilli 85 millions de dollars US d’investisseurs marocains, sans doute quelque peu déçus de son infortune financière, et la perspective de passer 50 années en prison aux Etats-Unis lui paraissait alors sans doute préférable à celle de leur expliquer pourquoi ils ne reverraient plus leur argent:

First, it may not have been all that safe in sunny Morocco. This is hearsay, but one report suggested that “investors in Morocco” had given Rothstein $85 million, and assuming they now realize they are not getting that money back, he might have needed to extradite himself from Morocco on the double. But this report describes Rothstein as being “as happy as ever” during his time in Morocco. Hard to believe he was that way all the time, as his life collapsed, but he didn’t act hunted.

Je doute que Yassir Znagui demande de sitôt à Scott Rothstein de jouer des clips publicitaires en faveur du tourisme au plubopaysdumonde:

Once safely in Morocco, why the hell did he come back? I don’t think there is a clear answer to this, either, but here are some possibilities. (…)

Second, as the Wall Street Journal noted, Rothstein’s partner Stuart Rosenfeldt has claimed that in an email from Morocco, Rothstein listed his options as suicide, life on the run or life in prison, and that Rosenfeldt urged him to “choose life.” Maybe so, but maybe he didn’t mean life in prison, the prospect of which might convince Rothstein to cut a deal. (…)

So, third, Rothstein may have a lot to chat about, and maybe having seen Morocco, he decided he might be able to cut a deal good enough to at least make prison reasonable in comparison to that hellhole. Under the plea bargain, prosecutors agreed to recommend a sentence reduction and more lenient prison conditions in exchange for cooperation. As a result, he is expected to get about 30 years rather than the 100 he faces. (Bernie Madoff did not cooperate, and got 150 years.) Still, 30 years is 30 years. (…)

On the other hand, maybe he just really hates Moroccan food.

Rothstein bénéficiait cependant de l’aide d’un guide étatsunien d’origine marocaine, Khalid Ahnich:

When Rothstein made his strange trip to Morocco as his Ponzi scheme was falling apart, it was Khalid whom he used as his entree to Casablanca. Khalid flew to Morocco with Rothstein and Rothstein’s uncle, Bill Boockvor, on October 27 and spent six days serving basically as a guide for Rothstein in Casablanca, Rabat, and Marrakesh before the Ponzi schemer’s dramatic return November 2. (…) [H]e believed Rothstein was what he claimed to be: A very wealthy and powerful man with friends in high places looking to invest large sums of money into Morocco.

He said that during the Moroccan trip, Rothstein unexpectedly transferred $16 million into Khalid’s account at Banque Populaire in Casablanca. In the recent information filed by federal officials charging Rothstein with racketeering and other charges, prosecutors wrote that « up to the amount of $2 million » was still held in Khalid’s account. Khalid, however, says that is not so. He said that he immediately transferred the entire $16 million over to Rothstein’s newly formed Moroccan account and that he has none of it.

Deux remarques: un virement de 16 millions de dollars sur le compte d’un MRE ordinaire, et ni la banque ni la Bank al Maghrib ne poseraient de question, ceci 8 ans après le 11 septembre? J’ai du mal à le croire. Ensuite, un ressortissant étatsunien de passage au Maroc et donc sans adresse au Maroc pourrait ouvrir un compte bancaire local en mois de six jours? Etonnant, et si c’est vrai, inquiétant.

Mais le guide marocain de Rothstein se trouve faire partie de la Moroccan American Coalition, qui a des contacts étroits avec l’ambassade du Maroc à Washington:

Khalid, a professional and personable man who was dressed in his work attire of a neatly pressed shirt and tie, said that the attorney knew he was from Morocco and that he had an interest in fostering ties between his two countries. In fact, just a few weeks before, he had been in Washington, D.C., at the Moroccan Embassy for a meeting of the Moroccan American Coalition, of which he is a member. That D.C. meeting focused on bringing American investments to Morocco.

Si on lie ceci aux autres points d’interrogation, c’est troublant…

Rothstein semblait avoir un préjugé favorable envers le Maroc avant de s’y rendre:

« Rothstein told me, ‘I want to invest my money overseas. I read a book about Morocco, and it’s a good country, and Morocco treats Jewish people very well. And he asked me if I could help him. I said, ‘Absolutely, I can make calls for you. I can arrange a meeting with the mayor of Casablanca. I can show you around.' »

Bigre! La promesse d’une rencontre avec Mohamed Sajid?

L’ouverture du compte bancaire de Rothstein s’est faite sans passage à la mouqata’a ou copie certifiée conforme de quoi que ce soit:

They touched down in Casablanca at 9 a.m. Wednesday and checked into the Hyatt Regency Hotel there, all three of them staying in suites on the same floor (Rothstein footed the bill for Khalid’s room, of course). Rothstein wanted to relax before doing anything and called him about 1:30 p.m. to go to the bank.

Once at the bank, Khalid introduced Rothstein to the manager, and they opened Rothstein’s account. The money Rothstein said he was wiring from the U.S. hadn’t arrived in Khalid’s account yet, and they decided to return to the bank two days later, on Friday.

They went out to eat that night, and the following day, Thursday, Khalid showed him Casablanca. « The only thing he was interested in was business, » said Khalid. « We talked about how he could open businesses in Morocco. He said he wanted to open hotels, restaurants, and schools. He wanted to open an American school to teach people about the U.S. He would stand on street corners and say, ‘I’ll put the hotel there and the restaurant there.’ He had many plans.« 

Selon son guide, Rothstein appréciait quand même un peu le Maroc:

Yet, « he was in a good mood the entire time, » Khalid says with a bewildered tone. « He was always happy. He spent a lot of time at the hotel, and he loved the fact that in Morocco, he could smoke his cigars in the hotels and the restaurants whenever he wanted. He said, ‘This is a nice place. I’m going to be going between the States and Morocco, back and forth.’« 

Et son agenda était chargé – outre le rendez-vous avec Mohamed Sajid, un autre rendez-vous avait été pris avec le « maire » de Rabat, Fathallah Oualalou:

Monday, they returned to Casablanca. And that’s when Rothstein said he’d decided to go back to the States on Tuesday morning. Khalid reminded him that he had set up a meeting with the mayor of Casablanca on Tuesday and then another meeting with the mayor of Rabbat on Wednesday. Rothstein told him to cancel the meetings.

On ne peut avoir confiance en personne!

Pour finir là-dessus, comme l’avait déclaré un des avocats de son cabinet, interrogé sur les pays à choisir pour éviter toute extradition vers les Etats-Unis:

« If for some reason he vanishes into a foreign country, he must be certain he will be able to stay there for the rest of his life. Electronic passports go by fingerprints, not nationality, and are being implemented all over the world. He wants to avoid being a ‘ Roman Polanski’ in 30 years, » one of the attorneys answered.

Un charmant garçon ce Rothstein au passage. Ses toilettes étaient plaqué or, et ce juif pratiquant soutenait financièrement le parti républicain.

Il possède également une tenue dite du « Juif vengeur », the Jewish Avenger:

C’est sous ce nom, Jewish Avenger, qu’il a menacé un journaliste local:



Mega-wealthy lawyer, businessman, and political backer Scott Rothstein called me last week and told me he was the « Jewish Avenger » and was out to destroy me.

​Rothstein wasn’t joking; he was seething. He told me he was going
to sue me and my wife and bankrupt my household. Rothstein, the managing partner of the law firm Rothstein Rosenfeldt & Adler, said he would throw all his legal might at me until I could never « participate in the journalism community again. » He even said he was going to throw a news conference about me for the TV stations.

Lectures complémentaires:

– « Vademecum procédural pénal en matière de coopération juridique internationale« , Ministère marocain de la justice, (2008)

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