L’autre affaire Mohamed Dahmane

146

Mohamed Dahmane, joueur franco-algérien, a plus défrayé la chronique judiciaire que footballistique. Ayant rompu unilatéralement son contrat avec le club belge de KRC Genk en 2008, soit deux ans et demi avant terme, ce dernier lui avait réclamé le paiement des années de contrat qu’il lui restait, soit 880.000 euros, pour rupture abusive de contrat.  Le tribunal du travail de Tongres avait donné raison au club, mais en appel la Cour du travail d’Anvers a réduit cette somme à 220.000 euros, en l’alignant sur le régime de droit commun des travailleurs salariés. Cet arrêt a eu un très grand retentissement, les clubs, et pas qu’en Belgique, craignant que cela rende encore plus facile pour les joueurs de football professionnel de rompre unilatéralement leurs contrats.

L’hebdomadaire belge Sport Magazine l’a interviewé dans son numéro du 11 juin 2014, et revient sur cette rupture de contrat et les difficultés éprouvées par le joueur par la suite (il a pris de petits boulots au noir en 2008/2009 pour compenser la saisie sur salaire opérée par Genk), sa carrière n’étant pas vraiment brillante du point de vue sportif.

Comme souvent, ses problèmes à Genk ont commencé avec une mésentente avec l’entraîneur, l’ancien international belge Hugo Broos, qui souhaitait le faire jouer ailier droit plutôt que dans l’axe. Mais très vite le conflit a pris un tour ethnico-religieux – ce dont les médias relatant l’affaire Dahmane n’ont pas parlé:

Puis, Broos est venu me voir avant le début du ramadan pour me dire que j’allais rester un moment sans jouer si je le faisais. J’étais prêt à ne pas suivre le ramadan le week-end, mais en semaine, je me sentais capable de le combiner avec les entraînements. Il n’était pas d’accord avec ça et ça s’est vraiment gâté à ce moment-là.

Le conflit n’était pas que religieux, puisque le conflit linguistique belge a fait surface (Broos est néerlandophone):

A la même période, il a voulu virer tous les joueurs francophones, il nous soupçonnait de le boycotter.

Dans un autre club belge, le RAEC Mons, il s’est attiré une réputation de forte tête:

On a voulu me faire passer pour l’agitateur du vestiaire de Mons. Mais ce n’était jamais moi qui puais l’alcool à neuf heures du matin là-bas!

Quand le journaliste lui rappelle que son nom est cité pour revenir jouer à Mons, il rétorque:

Tout le monde sait ce que j’ai fait pour ce club. J’y suis passé il y a un an, je devais parler à Leone. En me voyant, Alain Lommers a dit: – Plus d’Arabes à Mons. Mais il n’est plus là. Donc, qui sait?

Dahmane revient sur ses origines sociales:

Je ne veux pas tout casser. Je sors de la cité, je viens d’une famille ouvrière mais je ne suis pas une racaille, je ne suis pas un animal, je n’ai pas de casier judiciaire, je ne suis jamais allé en prison, j’ai fait des études! On m’a collé une étiquette simplement parce que j’ai toujours dit les choses.

Le franc-parler de dahmane n’est pas nouveau – ainsi, sur le fait de percer dans le foot français en tant que maghrébin:

Voilà un aspect de l’affaire Dahmane qu’on a pas trop évoqué dans les médias, à tort. Je vous rappelle que Hugo Broos a entraîné l’équipe algérienne de la Jeunesse sportive de Kabylie

CAN : Regragui, le Franco-Marocain qui n’a jamais rêvé des Bleus

Total respect à la lecture de ces déclarations de l’ex-international marocain Walid Regragui:

Quand le Maroc l’appelle en 2000 pour rejoindre la sélection, il n’hésite pas une seule seconde. Il assume, lui le binational, de défendre les couleurs de son pays d’origine :

« Le Maroc était un choix naturel pour moi, même si je suis né en France. Et puis, honnêtement, l’équipe de France ne m’a jamais fait rêver. “

Il y a quelques mois, la question des binationaux, nés et formés en France mais internationaux dans le pays de leurs parents, avait fait polémique. Jouer pour son pays d’origine n’est pas forcément un choix par dépit.

Walid Regragui, défenseur latéral ou milieu droit, arrive dans le circuit professionnel sur le tard, à 24 ans. Toulouse puis Ajaccio, Santander (Espagne), Dijon et Grenoble.

En Ligue 1, il enchaîne les prestations solides et suscite l’intérêt quelques mois plus tard de son pays d’origine, le Maroc :

‘ Le Maroc, c’est mon pays, ma culture d’origine, mon histoire familiale et mon premier coup de coeur footballistique, pendant la Coupe du Monde 86 [en 1986, le Maroc devenait la première équipe africaine à passer le premier tour d’une phase finale de Coupe du Monde, ndlr].

Je ne me suis posé aucune question. C’était le choix du coeur, d’autant plus facile que je n’avais pas fait les sélections de jeunes avec la France.’

Et dire qu’il y en a pour douter de la loyauté et du sentiment d’appartenance des doubles nationaux (1)…

(1) Full disclosure: je suis double national…

Football as ideology

Lu dans Al Masry Al Youm:

The group began with a Facebook page. This allowed the members, all longtime Zamalek residents, to keep in touch easily and also offered community members opportunities to post their concerns.

The only topics that are not allowed are politics, religion and football,” says Shoukry Boutros, the self-described uncle of the group. “These types of posts are removed by the admins,” he says, because the Guardians do not want their group to be aligned with any particular ideology.

Auraient-ils peur d’être infiltrés par des ahlaouis?

Mounir Hamoud, le joueur maroco-norvégien qui boycotte un journal ayant republié les caricatures danoises

Mounir Hamoud est un jeune défenseur norvégien d’origine marocaine, qui vient d’être sélectionné en équipe nationale de Norvège en 2009. Mounir avait débarqué en Norvège en 1998, à l’âge de treize ans, ne parlant bien évidemment pas un mot de norvégien. Un an plus tard, ayant cherché à se faire des amis norvégiens, il s’inscrit dans un club et commença sa carrière footballistique. Déjà marié et père de deux enfants à l’âge de 25 ans, il est musulman pratiquant, chose relevée par la presse norvégienne:

24 år gammel er han nemlig allerede gift med en Bergens-jente, og far til to.

– Det er kanskje ikke så tradisjonelt, men jeg trives godt med familie, kone og barn.

– Har det noe å gjøre med at du er muslim?

– Selv om jeg er en praktiserende muslim, så måtte jeg jo ikke gifte meg så tidlig. Jeg måtte heller ikke få barn så tidlig, understreker han.

– Men både kona og jeg tenkte at det var fint å få barn tidlig. Vi ønsket ikke at det skulle være for stor forskjell i alder mellom oss og barna. Jeg tror det er fint for barna også, og jeg er glad for at vi gjorde det. (Nettavisen)

Traduction française:

Âgé de 24 ans, il est déjà marié avec une fille de Bergen, et père de deux enfants.

– C’est peut-être pas très traditionnel, mais je me plais avec une famille, une femme et des enfants.

– Est-ce lié au fait que tu es musulman?

– Même si je suis un musulman pratiquant, je ne devais pas pour autant me marier ni avoir des enfants si tôt.

Mais ma femme et moi pensions qu’il serait bien d’avoir des enfants tôt. On ne voulait pas qu’il y ait une trop grande différence d’âge entre nous et nos enfants. Je crois que c’est bien pour les enfants aussi, et je suis content de ce choix.

Le légendaire sélectionneur norvégien aux éternelles bottes en caoutchouc, Egil « Drillo » Olsen, l’a même désigné comme le jeune joueur norvégien ayant le plus de potentiel. Il a du tempérament: en 2007, lors d’un entraînement, il échangea des coups avec son co-équipier Trond Olsen alors qu’il jouait pour l’équipe de première division norvégienne Bodø Glimt et dit à son entraîneur « ferme ta gueule« .

C’est cependant en mars de cette année 2010 qu’il s’est vu accordé les unes de la presse norvégienne. En février, le journal local Avisa Nordland avait publié un article sur une intervention de la police de Bodø, qui avait décroché une affiche représentant une des caricatures danoises du Prophète d’un pont. Le journal avait publié une photo représentant cette affiche, et donc la caricature litigieuse. Mounir Hamoud, étant un musulman pratiquant, avait alors décidé de ne plus accorder d’entretiens à Avisa Nordland:

– Profeten betyr veldig mye for meg. Når min tro blir hånet på denne måten, blir jeg både såret og lei meg, sier Mounir Hamoud til VG Nett. (Verdens Gang)

Traduction française:

– Le Prophète signifie beaucoup pour moi. Quand ma foi est outragée de la sorte, je me sens blessé et triste, a déclaré Mounir Hamoud à VG Nett.

Mounir Hamoud a maintenu son boycott d’Avisa Nordland jusqu’au mois de juillet 2010. Son club, Bodø Glimt, avait déclaré respecter sa décision, tout en déplorant qu’un joueur refuse de parler à un journal:

– Vi velger likevel som klubb å respektere Hamouds syn. Han er en troende muslim og følger sine leveregler. Akkurat det er vi nødt til å akseptere, sier Hansen til Avisa Nordland (NRK)

Traduction française:

– Nous choisissons néanmoins, en tant que club, de respecter le choix de Hamoud. C’est un musulman croyant qui suit les règles de vie musulmanes. Nous sommes contraints de respecter cela, déclara le directeur du club Bjørn Tore Hansen à Avisa Nordland.

Hansen s’est simplement borné à espérer que le boycott soit de courte durée. Le club avait publié une courte déclaration de Hamoud sur son site, dans laquelle il justifiait sa décision:

« Jeg velger på nåværende tidspunkt å ikke snakke med Avisa Nordland. Jeg ble provosert, lei meg, trist og skuffet.

Jeg setter pris på ytringsfriheten. Og på samme måte som Avisa Nordland bruker ytringsfriheten til å trykke bilder av hånende karikaturer, så bruker jeg min frihet til å ikke ytre meg- til dem. Jeg tror gjensidig respekt er noe som vil gjøre god nytte for at samfunnet skal utvikle seg. »

Mounir Hamoud

Traduction française:

Je choisis pour le moment de ne plus parler avec Avisa Nordland. J’ai été provoqué, me suis senti triste et déçu.

J’attache du prix à la liberté d’expression. Et de la même manière qu’Avisa Nordland use de sa liberté d’expression pour publier des caricatures méprisantes, j’utilise la mienne en ne leur adressant plus la parole. Je crois que le respect mutuel est uen chose qui sera utile pour le développement de la société.

Mounir Hamoud

Le rédacteur en chef d’Avisa Nordland, Jan-Eirik Hanssen, déplora lui aussi la décision de Hamoud tout en reconnaissant que ce dernier avait le droit de ne pas s’exprimer:

– Vi har ytringsfrihet. Som privatperson har Mounir Hamoud også en rett til ikke å ytre seg, men som fotballspiller i Glimt har han en offentlig rolle. Det gjør det problematisk at han som spiller ikke ønsker å uttale seg til oss, sier Hanssen. (NRK)

Traduction française:

– Nous avons la liberté d’expression. En tant que particulier, Mounir Hamoud a également le droit de ne pas s’exprimer, mais en tant que joueur de foot à Bodø Glimt il a un rôle public. Il est de ce fait problématique qu’il choisisse, en tant que joueur, de ne pas nous faire de déclaration, déclare Hanssen.

Les réactions au boycott décidé par Mounir Hamoud furent très vives, notamment dans les forums de discussion sur Internet. Une fois cependant son boycott terminé, en juillet de cette année, il a fait l’objet de chants islamophobes lors d’une rencontre à l’extérieur contre Sarpsborg: des supporters adverses lui auraient crié « retourne à Al qaïda » et « tu n’as rien à faire ici« :

-Det er ikke noe hyggelig å få slike kommentarer. Jeg har hørt ett og annet fra tribunen tidligere, men aldri så ille som jeg opplevde det i Sarpsborg, sier Hamoud til lokalavisa. (…) Folk ser jo at jeg er muslim. Likevel føler jeg at jeg burde slippe slike tilrop. Jeg synes ikke noe om slikt.
(Dagbladet)

Traduction française:

– Ce n’est pas agréable d’entendre de tels commentaires. J’en ai entendus quelques uns des tribunes auparavant, mais jamais aussi désagréables que ceux que j’ai entendus à Sarpsborg, a déclaré Hamoud à un journal local. (…) Les gens voient bien que je suis musulman. Je trouve quand même que je ne devrais pas avoir à entendre de telles paroles. Je n’aime pas ça.

Ironiquement, le journal local en question était celui qu’il avait décidé de boycotter quelques mois plus tôt…

Le directeur sportif de Sarpsborg, Bjørn Inge Nilsen, affirme ne pas avoir entendu ces commentaires, mais dénonce les propos qui auraient été tenus et déclare vouloir contacter Hamoud pour l’assurer de son soutien. Il affirme que l’incident sera discuté en interne, au sein du club et avec les supporters, soulignant que Sarpsborg avait eu le prix du fair play en 2009. Un leader des supporters du club de Sarpsborg, Kjetil Fröne, déclare lui aussi ne rien avoir entendu, mais affirme avoir une politique de tolérance zéro contre le racisme et assure que s’il avait entendu de tels propos d’un supporter, il l’aurait éjecté des tribunes sur le champ.

Mounir Hamoud a cependant renoncé à signaler l’incident à la fédération norvégienne de football.

Pour ma part, je ne sais pas si Mounir Hamoud a un imprésario ou un attaché de presse, mais quelqu’un devrait peut-être lui dire de changer de look, histoire de ne plus se faire traiter aussi facilement de sympathisant d’Al Qaïda…

Jagdszenen aus Niederbayern – nun in Alger, ou comment le foot dégénère en pogroms

Ca avait très mal commencé au Caire, avec des jets de pierre d’une gravité extrême contre le bus des joueurs algériens deux jours avant le match Egypte-Algérie ce 14 novembre, qui s’est clos après une victoire égyptienne 2-0 menant à un match de barrage entre les deux équipes ce mercredi 18 à Khartoum – les vidéos, qui montrent des joueurs algériens blessés par jets de pierre, sont indiscutables et on ne peut mettre en dout, comme l’a fait de manière ignominieuse la presse égyptienne, la réalité de cette agression – voir les vidéos ici (via France 24).

Voir également le bref compte-rendu d’El Watan:

Ce qui s’est vraiment passé

Les Verts qui sont arrivés hier à l’aéroport international du Caire vers 16h, ont été victimes d’une véritable agression de la part des supporters égyptiens qui se sont faufilés au milieu des supporters algériens entassés à la sortie de l’aéroport pour accueillir leurs idoles avant de rejoindre l’hôtel Liber Hôtel (ex-Moevenpick) se trouvant à environ 200 mètres.

Au moment où le bus transportant la délégation algérienne allait amorcer son dernier virage, il a été bombardé par des pierres et des projectiles de toutes sortes qui ont atteint quatre joueurs et l’entraîneur des gardiens de but, provoquant de sérieuses blessures à certains d’entre eux. Il s’agit entre autres de Halliche et Lemouchia qui ont été sérieusement blessés à la tête, Saïfi et Chaouchi qui eux ont été touchés à la main. Le bus transportant la délégation algérienne a été sérieusement endommagé. Aussitôt arrivés à l’hôtel, la délégation algérienne a fait appel au représentant de la FIFA chargé de la sécurité, le Suisse Gagg Walter pour constater les dégâts et les blessures. Les joueurs étaient sous le choc et les présents se demandaient comment des supporters égyptiens se trouvaient sur les lieux après toutes les assurances données par les autorités du pays d’accueil.

Par Y. O.El Watan)

La théorie du complot a été embrassée des deux côtés – les Egyptiens en accusant de manière ridicule les joueurs algériens de s’être en quelque sorte auto-mutilés dans un complot anti-égyptien dont on peine à percer les motivations, sachant que la FIFA n’a jamais à ma connaissance accordé de victoire sur tapis vert à l’équipe visiteuse pour cause de violences en dehors du stade. Du côté algérien, l’attaque du bus de l’équipe algérienne n’aurait pas été le fait de hooligans mais le fruit d’une conspiration impliquant les services secrets égyptiens:

Un parlementaire égyptien à Echourouk : « le chauffeur du bus est un informateur connu par les services de sécurité égyptiens ». (…)

Un parlementaire égyptien n’a pas hésité à faire cette déclaration par téléphone au quotidien Echourouk, parlant du scénario de l’agression des Verts et du rôle joué par le chauffeur du bus, qui a fait un faux témoignage suite aux instructions qu’il a reçue quelques jours avant l’arrivée des joueurs algériens en égypte.

Ce parlementaire a affirmé que ce chauffeur est un informateur des égyptiens, qui avait été chargé par la mission de faire un faux témoignage et d’accuser à tort non seulement les joueurs, mais aussi le ministre algérien de la jeunesse et des sports, et ce en indiquant que ce dernier lui a déchiré la chemise.

Le parlementaire a été clair dans sa déclaration, et il dit : « J’ai peur que vous publiez mon nom, et subir cent fois plus que ce que vos joueurs ont subi », et de ce fait, il s’est contenté pour le moment de révéler la vérité, et à l’avenir nous allons ouvrir une enquête sécuritaire en usant de nos moyens politiques, avant de poursuivre : « Il ne faut pas s’étonner si le chauffeur maintienne ses propos pour faire croire que c’est la vérité qu’il dit, nous les Egyptiens on se connaît les uns les autres. Sa mission était et est toujours d’espionner les étrangers à travers sa soi-disant profession de chauffeur de bus, et il a été choisi pour jouer ce mauvais rôle, à savoir faire un faux témoignage »

Ce même responsable a ajouté cette déclaration : « Je suis sûr que c’est lui-même qui a déchiré sa chemise pour lui servir de preuve supplémentaire à ses faux témoignages. A savoir quelle serait sa récompense ?» (Ech-chourouk)

De même, les célébrations palestiniennes à Gaza après le second but égyptien seraient « le fruit des manœuvres des services secrets égyptiens présents en force sur les territoires occupés » (Liberté).

Des violences ont ensuite eu lieu après la fin du match au Caire, et des supporters algériens affirment avoir été agressés à coups de pierre par des hooligans égyptiens (les récits contiennent de nombreuses exagérations, mais la description des agressions semblent suffisamment détaillée pour être crédible):

« Cela a commencé juste après la fin de la rencontre. Nous attendions dans les tribunes les instructions des services de sécurité égyptiennes pour monter dans les bus. Vers minuit, on quitte le stade du Caire escortés par une voiture de police et une vingtaine de minutes après notre départ, la voiture disparaît. Le bus ralentit avant qu’une meute de supporters égyptiens nous attaque avec des jets de pierres et des armes blanches. Ils étaient comme des fous, pire que les sionistes. Ils voulaient nous tuer. Les bus qui transportaient nos supporters étaient totalement endommagés. Et tout cela sous le regard de la police », témoigne Tayeb Meriem, ancien député, qui faisait partie de la délégation. (…) « Tout au long du trajet, les Egyptiens n’arrêtaient pas de nous caillasser. Il y avait beaucoup de blessés », a ajouté l’ex-parlementaire. (

Un journaliste algérien raconte avoir été agressé par la foule également à l’aéroport, au départ du Caire:

« On croyait que tout était terminé après le cauchemar de la nuit du match, malheureusement pour nous, une centaine d’Egyptiens étaient embusqués à l’intérieur de l’aéroport. Dès qu’on a franchi les portes de l’aéroport, on a été attaqués par une foule déchaînée. Même les journalistes ont été agressés. On a été pris en otage », témoigne, Bachir Cherif, directeur du journal La Tribune.

D’autres témoignages algériens semblent crédibles:

« C’est un véritable guet-apens, un traquenard dans lequel les supporters algériens sont tombés à leur sortie du stade », dit Yacine. L’homme qui parle ainsi, c’est le docteur Yacine Hakimi, chirurgien au CPMC de l’hôpital Mustapha d’Alger il sait exactement de quoi il parle en matière de blessures et de traumatismes. (…)

Selon son témoignage, les bus des supporters algériens sont sortis vers 1h de l’enceinte du stade, escortés par la police. Seulement, au bout d’une dizaine de kilomètres, cette escorte a rebroussé chemin pour livrer ceux qu’elle était censée protéger à la furia des supporters égyptiens résolus à tailler en pièces tout Algérien qui leur tomberait sous la main. Une pluie de projectiles a commencé alors à tomber sur les bus ; les vitres ont explosé les unes après les autres. « Je croyais mon heure arrivée », poursuit Yacine.

« une Algérienne déshabillée devant nous »

Le chauffeur du bus égyptien a refusé de continuer sous prétexte que sa vie était en danger. Les malheureux supporters ont été contraints de faire le reste du trajet à pied au milieu d’une foule hostile qui continuait à les bombarder de pavés et de pierres et à les abreuver d’injures. « Ce n’est qu’une fois à l’intérieur de l’hôtel que j’ai pu donner les premiers soins. Là, j’ai eu affaire à une crise d’épilepsie, un cas de traumatisme fermé du coude, un traumatisme grave du bassin, un traumatisme oculaire grave, et deux côtes cassées sans compter les plaies ouvertes sur la face ou au cuir chevelu », raconte encore notre médecin. (El Watan)

Le gouvernement égyptien a promis d’assurer la sécurité aux Algériens,  mais rien n’a été fait, la police nous a même lâchés face à un public déchaîné. Et nous étions obligés de réquisitionner une dizaine de policiers le temps d’avertir le consulat. Ce n’est que vers les coups de 4h du matin que nous avons pus sortir du stade” (Liberté)

Plus grave, des supportrices algériennes auraient subi de l’harcèlement:

Nesma est étudiante au Caire. Elle raconte les humiliations et les brimades subies au stade. « Des femmes policières nous ont déshabillées alors que leurs collègues hommes nous regardaient. Nous avons été continuellement insultées pendant les trois heures d’attente que nous avons passées à attendre pour entrer dans l’enceinte du stade », dit-elle, en nous montrant les photos de supporters algériens couverts de sang qu’elle a prises avec son propre appareil à la sortie du stade. (El Watan)

Je suis venue de France pour voir l’équipe nationale. Étant étudiante à l’université  de Grenoble, j’ai dû faire des économies avec mes amies pour payer mon séjour et une émulation en prime. Je me suis  retrouvée à moitié nue dans la cabine du poste de police du stade. Le policier m’a indiqué la cabine destinée aux femmes pour la fouille. Je me suis exécutée en croyant qu’il s’agissait d’une procédure normale de vérification. À l’intérieur, la policière a procédé à la fouille de mon sac à main –  en me confisquant mes produits de beauté prétextant qu’ils peuvent servir de projectiles – puis elle m’a demandé de lever les bras pour une fouille corporelle.  Subitement, elle change d’avis en exigeant de moi d’enlever mon pull et mes chaussures, comme j’ai refusé, elle m’a bousculée devant une table et elle m’a menacée de le faire. Une fois fait, elles se sont mises à rire aux éclats en me regardant. Ma fouille ressemblait à celle des détenus. Et dire que j’avais une haute opinion de ce pays. Je rentre demain chez moi.” (Liberté)

Le ministre de la solidarité, de la famille et des ressortissants algériens établis à l’étranger Djamel Ould Abbas a vertement critiqué la partie égyptienne:

« on était victime d’un sketch où les autorités avaient joué leur rôle dans l’hypocrisie. Dés notre arrivée, ils nous ont donné des garanties, mais dés notre sortie de l’aéroport, on a compris l’enfer qu’on nous a préparé » « on a pris place sur la tribune officielle, on a été soumis à une pression terrible, mais jamais on a imaginé que leur haine pouvait arriver à siffler l’hymne national algérien, même les joueurs n’avaient rien entendu. J’ai salué l’hymne national algérien comme un militaire le ferait, et j’ai fait de même avec l’hymne national égyptien, mais j’ai élevé ma voix en présence de 14 ministres égyptiens, pour dire « la honte à l’Égypte, cet hymne national, c’est malheureux que la haine et le mépris arrivent au degrés de siffler le drapeau national » « dés qu’ils ont marqué le deuxième but, je fus ciblé de tirs par un grand sac, qui comprenait des figues sèches, et à ce moment là, on ne pouvait distinguer le ministre du citoyen, parce que les tirs en direction des tribunes réservées aux algériens avaient pris une tournure horrible » « on a un enregistrement vidéo mettant en évidence les agressions dont avaient fait l’objet des officiels algériens ainsi que de simples citoyens algériens sur les tribunes du stade de la mort au Caire »

« ils nous ont attaqué comme des sauvages » (Ech-chourouk)

Des rumeurs faisant état de morts algériens au Caire ont été rapportées par la presse algérienne, notamment Ech-Chourouk, quotidien arabophone – mais traduisant une sélection d’articles en anglais et en français (quotidiens marocains, prenez-en de la graine!) – à grand tirage qui semble être l’Al Masae algérien:

L’on parle de morts et de centaines de blessés. Des chiffres qui font peur et qui circulent parmi la population et au sein des redaction. En l’absence d’une information officielle, les rumeurs vont bon train. Mais, selon les témoignages de rescapés algériens présents, hier, au Caire et arrivés à Alger depuis ce matin, il s’agit de quatre morts averées dont l’un est tombé sous les yeux de notre interlocuteurs. Aucun chiffre officiel n’a été déclaré. Les speculations s’affolent face à la difficulté d’obtenir des informations fiables. Seuls, les témoignages d’algériens de retour de cet enfer en font état. (Ech-chourouk)

Le nombre des morts algériens allégués varie de 1 à 12, en passant par 4, 5 ou 7, selon les sources contradictoires, qui n’ont d’ailleurs pas été reprises par des médias non-algériens, à ma connaissance.

Le témoignage d’un rappeur algérien ayant fait le déplacement et qui fait état de quatre morts semble spectaculaire au premier abord:

Parmi ces blessés, le chanteur de Rap Reda City 16, qui est venu dés son arrivée en Algérie, à la rédaction du journal pour apporter ses témoignages, photos et vidéo à l’appui. Selon ce dernier,  » des algériens étaient « offerts » à la vindicte des égyptiens. Les policiers chargés de protéger les supporteurs algériens les guidaient à travers les dédales de ruelles cairote, tout droit dans un guet apens ou ils sont attendus par une horde de voyous. Les policiers ne s’empêchaient pas de parfaire leur forfait en criant « voici des algériens » et de prendre ensuite la fuite laissant nos compatriotes désarmés, perdus et livrés à un caillassage en règle« . Cette « opération » digne d’une période nazie aurait « coûté la vie à quatre algériens« , dont l’un est mort sous les yeux du rappeur qui déclare « avoir fait la chahada à la victime avant de la couvrir de l’emblème national« . Notre interlocuteur rapporte qu’ « Une femme enceinte accompagnant son mari, n’a du son salut » qu’à la bravoure de notre témoin qui affirme s’être  » jeté sur elle la plaquant par terre pour éviter les cailloux, son mari avait perdu connaissance, atteint par les projectiles« . « Une fois conduite à l’hôpital, cette dame aurait perdu son fœtus » ajouta-t-il. (Ech-chourouk)

Je ne suis pas vraiment convaincu, même si les images qu’il aurait filmées sur son portable sont troublantes: difficile de déterminer si les photos d’un supporter dans un drapeau algérien ensanglanté montrent un blessé ou un mort. On ne voit pas comment le nom du ou des supporters morts ne saurait pas amplement diffusé et claironné sur les toits par les très nombreux journaux et sites algériens, ni comment de très nombreux témoins, au Caire, à l’ambassade d’Algérie, aux aéroports du Caire et d’Alger puis en Algérie ne confirment pas un décès, car on ne transporte pas un cadavre d’Egypte en Algérie comme un simple colis postal (un site algérien fait état du rapatriement d’un cadavre de supporter algérien décédé, mais sans aucune information complémentaire ou confirmation par d’autres sources) , comme peuvent en témoigner les Marocains qui font rapatrier au Maroc le corps d’un parent mort à l’étranger. Ce qui est certain, encore une fois, c’est que la violence de prétendus supporters égyptiens a fait de nombreux blessés algériens.

D’autres allégations sont très excessives – El Watan (qui maintient que des Algériens sont morts au Caire) cite un supporter algérien assurant qu’un Algérien aurait été… brûlé vif:

Un autre supporter, Hellal d’Alger, a affirmé avoir vu un supporter brûlé vif par des Egyptiens, lors de son retour du stade. (El Watan)

On imagine mal que dans une ville de 20 millions d’habitants, un soir où la moitié d’entre eux se trouvait dans la rue pour fêter la, miraculeuse victoire égyptienne, il ne se trouverait aucun témoin, même par parmi les milliers d’Algériens, aucun appareil photo, aucun téléphone mobile pour enregistrer ou confirmer la scène spectaculaire d’un supporter algérien brûlé vif…

L’ambassadeur algérien au Caire, Abdelkader Hadjar, a ainsi démenti ces rumeurs, de même que, de manière plus attendue, le porte-parole du ministère égyptien de la santé:

Mondial: aucun décès d’Algérien au Caire samedi (ambassadeur d’Algérie)

L’ambassadeur d’Algérie en Egypte Abdelkader Hadjar a affirmé dimanche qu’aucun supporteur algérien n’avait trouvé la mort après le match de football comptant pour la qualification au Mondial 2010 ayant opposé samedi au Caire les équipes d’Algérie et d’Egypte.

Le porte-parole du ministère égyptien de la Santé, Abderrahmane Chahine, a également démenti à l’AFP au Caire dimanche en soirée tout décès parmi les Algériens venus soutenir leur équipe.

« Nous démentons tout décès parmi les supporteurs algériens« , a déclaré M. Chahine.

Les deux pays ont cependant fait état de plusieurs supporteurs des deux nationalités blessés.

« A cet instant, aucun décès n’a été signalé du côté des supporteurs algériens » après cette rencontre, a indiqué M. Hadjar dans une déclaration à la chaîne 1 de la radio nationale algérienne citée par l’agence APS.

« Des informations circulaient depuis samedi faisant état de la mort de supporteurs algériens au Caire, mais après vérification, notamment auprès des services hospitaliers, aucun décès nous a été signalé« , a-t-il affirmé.

L’ambassadeur algérien a également démenti les informations rapportées par certains médias, selon lesquelles « les corps de six victimes sont arrivés à l’aéroport international Houari-Boumediene » d’Alger, ajoute l’APS.

« Le gouvernement égyptien nous a informés sur les blessures de onze Algériens, qui ont quitté l’hôpital après avoir reçu des soins« , a-t-il encore indiqué, toujours de même source.

M. Chahine avait auparavant dressé un bilan de 32 personnes, dont 20 Algériens, blessées dans la nuit de samedi à dimanche.

Un journaliste de l’AFP sur place avait rapporté qu’au moins quatre bus transportant des Algériens avaient été caillassés après le match.

La sélection algérienne avait été la cible de jets de pierres peu après son arrivée au Caire jeudi soir. Trois joueurs avaient été blessés. (…) (Le Monde)

Ces démentis semblent crédibles: Le Caire n’est pas le Waziristan ou le Sud Kivu, et on y meurt pas sans la légendaire bureaucratie égyptienne – certificat de décès, permis d’inhumer et, pour victimes étrangères, les formalités nécessaires au transport d’un cadavre vers son pays d’origine, chose qui ne peut se faire qu’avec la coopération des services consulaires et aéroportuaires dudit pays, c’est-à-dire l’Algérie. On peut donc présumer que l’ambassadeur d’algérie parle en connaissance de cause, à moins qu’il ne fasse lui aussi partie d’un « complot diabolique » comme les a dénoncés le président de la fédération algérienne… Il est vrai que l’ambassadeur algérien a été vertement critiqué pour ses propos démesurément optimistes d’avant-match:

Abdelkader Hadjar est d’abord revenu sur la fameuse « Journée Mondiale de la Peur » que certaines parties égyptiennes menacent d’organiser pour semer la frayeur parmi les joueurs de la sélection algérienne. Notre interlocuteur révèle qu’il a personnellement exposé le sujet aux services de sécurité égyptiens qui lui ont donné des garanties quant à la sécurité des joueurs, des accompagnateurs et des supporters algériens. Ces services ont indiqué qu’il ne faut pas se fier aux informations communiquées par les médias ou les forum d’Internet, d’autant que les rassemblements près de l’hôtel où séjourneront les algériens sont strictement interdits. Ils ont assuré que les déplacements des Verts seront encadrés sur le plan sécuritaire, rapporte Hadjar. (…) Le représentant de la diplomatie algérienne a expliqué au sujet du séjour des supporters, que des efforts sont fournis afin que les algériens soient logés dans des hôtels proches les uns des autres, et de préférence loin du centre-ville, pour éviter un contact trop proche avec les supporters des Pharaons. L’ambassadeur rassure quant à la sérénité du climat et des intentions des responsables égyptiens qui oeuvrent pour que la rencontre se déroule dans les meilleures conditions. (Ech-chourouk)

Aujourd’hui mardi, un communiqué officiel du ministère algérien des affaires étrangères a confirmé qu’aucun supporter algérien ne serait décédé au Caire:

Aucun Algérien n’est décédé au Caire

Le ministère des Affaires étrangères a rendu public lundi un communiqué dans lequel il a réaffirmé qu’aucun citoyen algérien n’est décédé au Caire à la suite des incidents survenus après le match Egypte-Algérie.

Voici le texte intégral du communiqué du ministère rediffusé à la demande des abonnés : « Des rumeurs et des informations erronées ont été colportées, selon lesquelles des décès auraient été enregistrés parmi les ressortissants algériens qui se sont rendus au Caire pour supporter l’équipe nationale de football.

A l’issue des investigations, menées par l’ambassade d’Algérie au Caire auprès des autorités locales et au niveau des hôpitaux et des morgues, le ministère des Affaires étrangères tient à démentir formellement ces allégations. Aucun ressortissant n’est décédé au Caire à la suite des incidents survenus, ni parmi les supporters qui se sont déplacés à partir du pays, ni parmi les Algériens résidant en Egypte.

Nos supporters algériens ont effectivement été victimes d’agressions indignes de la part d’énergumènes avant ou après le match de samedi dernier. A la suite de ces incidents, il a été enregistré une vingtaine de blessés parmi nos ressortissants à des degrés divers, mais fort heureusement sans gravité, qui ont tous quitté les structures hospitalières après avoir reçu les soins nécessaires.

La liste des blessés est disponible au ministère des Affaires étrangères. Par ailleurs, plus de 300 citoyens qui ont fait le déplacement au Caire ont choisi de se rendre de cette ville à Khartoum pour soutenir encore l’équipe nationale. Leur transfert est actuellement en cours avec des vols spéciaux de la compagnie Air Algérie et des forces aériennes de l’ANP.

Le ministère des Affaires étrangères espère que ces informations seront de nature à rassurer notre opinion publique et à favoriser le retour au calme et à la sérénité. Une cellule de suivi a été mise en place au ministère des Affaires étrangères depuis le 11 novembre dernier.

Toute personne n’ayant pas de nouvelles d’un proche qui se serait rendu au Caire pour le match de samedi dernier est invitée à prendre contact avec cette cellule au numéro vert suivant : 30-40″. (El Watan)

Le mal était en tout cas fait – le mélange de faits réels de violence, absolument inacceptables, et de rumeurs sans fondement – du moins à ce jour – a entraîné des actes de violence en Algérie, contre les expatriés égyptiens qui y habitent, le plus souvent représentants des importants intérêts économiques égyptiens dans ce pays: la multinationale égyptienne Orascom est ainsi titulaire d’une licence de téléphonie mobile via sa filiale Djezzy, et d’intérêts dans le ciment qu’elle vient de cèder au groupe français Lafarge. Des voyous algériens s’en sont ainsi pris aux différentes entreprises égyptiennes en Algérie, et des cordons de sécurité renforcés ont protégé l’ambassade d’Egypte à Alger. Paradoxalement, le nouveau siège de la Fédération algérienne de foot-ball (FAF) est construit par l’entreprise égyptienne Arab Contractors, avec du personnel égyptien (cela semble souvent être le cas en Algérie, les entreprises étrangères emmènent leur propre personnel plutôt que de recruter localement) – qui ont préféré se réfugier à l’ambassade d’Egypte à Alger:

Ils sont chargés de réaliser le nouveau siège de la FAF: Les ouvriers d’Arab Contractors se réfugient à l’ambassade

Les employés de l’entreprise égyptienne Arab Contractors, qui sont en train de réaliser le nouveau siège de la Fédération algérienne de football ont changé de direction hier.

En effet, au lieu de se rendre à leur lieu de travail, ils ont choisi de se réfugier à l’ambassade d’Égypte à Alger de peur d’être agressés. C’est ce qu’on appelle l’ironie du sport. (Liberté)

Leur peur est loin d’être infondée, au vu de véritables pogroms qui ont lieu contre des Egyptiens résidant en Algérie – ainsi, le personnel égyptien d’Orascom à M’sila a vu son complexe résidentiel saccagé par la foule:

Violence anti-égyptienne en Algérie

Le 14/11/2009 à 10:41

Un groupe de jeunes Algériens a attaqué jeudi soir une résidence habitée par des cadres de la cimenterie du groupe égyptien Orascom à M’sila, au Sud-Est d’Alger, après le caillassage au Caire du bus transportant l’équipe nationale algérienne, rapporte samedi la presse algérienne.

La police est intervenue pour mettre les cadres égyptiens et leurs familles à l’abri mais «tous les appartements de la résidence ont été saccagés et pillés» et une voiture incendiée, précise le quotidien. Le Quotidien d’Oran ajoute que 14 policiers ont été blessés durant des affrontements entre les forces de l’ordre et les jeunes pendant cette opération.

A Alger, toutes les rues menant à l’ambassade d’Egypte ont été fermées dès jeudi soir et les locaux de sociétés égyptiennes sécurisées. (Avec AFP) (L’Equipe)

Une foire à Tlemcen a été attaquée par des émeutiers souhaitant s’en prendre aux exposants égyptiens:

Tlemcen: La foire commerciale attaquée

par Allal Bekkaï (Le Quotidien d’Oran)

La foire commerciale Faimap Expo (Oued Souf) qui se tient actuellement à Chetouane, dans la wilaya de Tlemcen au niveau des locaux des ex-Galeries algériennes, a été la cible, dimanche de jets de pierre lancés par des jeunes en colère. La baie vitrée de la porte d’entrée a volé en éclats. Chauffés à blanc, les assaillants voulaient en découdre avec les exposants égyptiens. Suite à cet incident, il a été décidé d’évacuer des lieux les trois commerçants égyptiens, selon le gérant rencontré sur place.

A Skikda, des travailleurs d’une filiale du groupe égyptien Orascom semble avoir pris d’assaut leur propre usine, un cadre égyptien ayant du quitter sous escorte policière:

Skikda: Des travailleurs algériens empêchés de rejoindre leur lieu de travail

par A. Boudrouma (Le Quotidien d’Oran)

Le service d’ordre a mis fin à un rassemblement de centaines de travailleurs devant les portes de la société égyptienne OCIA filiale d’Orascom après la tournure prise par les événements.

En effet, les travailleurs interdits d’accès à leurs lieux de travail pour la troisième journée consécutive se sont mis à jeter des pierres en direction des baraquements désertés par précaution en raison de la tournure prise par le match Algérie-Egypte et les informations qui ont couru au sujet des dures conditions auxquelles ont été soumis fans et joueurs de l’équipe nationale de football, en Egypte.

Les travailleurs ont quitté les lieux bruyamment pour sortir ensuite de la zone industrielle encadrés par un service d’ordre venu en renforts, en scandant des «One, two, three, viva l’Algérie» et autres slogans d’encouragement de l’équipe nationale de football.

A noter que la tension n’a pas cessé de monter durant les trois jours d’arrêt, tension exacerbée par des provocations de membres de la communauté égyptienne qui selon des témoignages de travailleurs de la plate-forme pétrochimique ont été à l’origine du débordement. Un cadre d’OCIA qui était venu le matin a été évacué sous bonne escorte policière. A noter que cette société sous-traite la partie génie civil du méga-train GNL de Sonatrach, pour le compte de la firme américaine KBR.

Au centre-ville, les forces de l’ordre ont renforcé la sécurité autour du siège de Djezzy, l’opérateur de téléphonie mobile du même groupe égyptien Orascom, tandis qu’à quelques mètres de là des centaines de jeunes avaient pris d’assaut les bureaux d’Air Algérie pour retirer le précieux billet du voyage en direction de Khartoum au Soudan.

 A Aïn Defla, 2.000 émeutiers ont assiégé un hôtel où se trouvaient des hommes d’affaires égyptiens, avant de saccager un local commercial de Djezzy, la filiale téléphonique d’Orascom, et le commissaire de police se félicite d’avoir pu éviter la perte de vies humaines:

Nuit d’échauffourées à Aïn Defla: Un hôtel et l’agence Djezzy Saccagés

par M. N. (Le Quotidien d’Oran)

La ville de Aïn Defla a été le théâtre d’échauffourées durant la nuit de dimanche à lundi. En effet, le soir vers 22h, quelque 2.000 jeunes s’en sont pris à l’hôtel «Doui» où séjournent depuis des mois des Egyptiens cadres d’une société industrielle implantée à Aïn Defla. La police s’est interposée et a tenté d’abord de calmer les esprits surchauffés en réaction aux images chocs diffusés dans certains médias et surtout d’une vidéo circulant sur le Web faisant état d’Algériens tués au Caire. Les officiers de police ont tenté de nouer le dialogue avec les manifestants pour éviter tout dérapage, rien n’y a fait. Des renforts sont dépêchés sur les lieux. Devant le bouclier placé devant l’hôtel, les quelque 2.000 manifestants ont réagi par des jets de pierres. A la dernière limite, les policiers ont tenté d’éloigner la foule de l’hôtel en usant de gaz lacrymogène, pendant que d’autres policiers utilisant une voiture blindée ont fait évacuer les ressortissants égyptiens pour les placer en lieu sûr. Tirs de bombes lacrymogènes, jets de pierres, cela a duré 2h environ.

Quelque 600 à 700 individus se sont ensuite dirigés alors vers l’agence Djezzy où déjà la police avait pris place. Là aussi les officiers de police ont tenté le dialogue pour dissuader la foule de ne pas commettre l’irréparable. Avant d’être dépassés par les événements, des policiers ont pu évacuer le gardien de nuit, les armes des gardiens et les coffres. «Ce fut et c’est notre but primordial», nous a déclaré le commissaire Halim, chargé de communication. Une fois la mission essentielle accomplie par les policiers, ces derniers ont été submergés par la foule déchaînée. Les locaux sont alors saccagés. «Les dégâts matériels comptent peu à côté des vies humaines», nous déclare le commissaire. Quelques policiers ont subi des blessures légères causées par les jets de pierres. Cependant avant que les dégâts ne prennent plus d’ampleur et ne s’étendent à d’autres secteurs, bon nombre de citoyens, des sages sont alors intervenus et après des heures de palabres, les esprits se sont calmés ici et là. Le wali en personne était sur les lieux et a pris langue avec les manifestants en colère. La police a procédé à 14 interpellations.

A Constantine, slogans à la gloire de l’armée, tentative de mise à sac d’une agence de Djezzy (filiale algérienne du groupe égyptien Orascom) et appels au boycott de produits égyptiens se sont mêlés:

La circulation était complètement bloquée au niveau de ce carrefour vital du centre-ville. Des écoliers et des jeunes chômeurs criaient « Pas d’école, pas de travail, tous avec les Verts !». «Djeïch, Châab mâak ya Saâdane» (L’armée et le peuple sont avec toi Saâdane), leur répondait avec ferveur un autre groupe massé sur le trottoir d’en face. A ce moment, un groupe d’une cinquantaine d’adolescents, agitant drapeaux et slogans, débouche de la rue Boudjeriou. Ils revenaient du quartier Belouizded où ils étaient allés dans l’intention de saccager et brûler les bureaux de Djezzy, mais ils furent repoussés aussitôt par les forces de l’ordre. En route vers les locaux de cet opérateur de téléphonie mobile, dont l’agence de la ville du Khroub a été, pour rappel, saccagée dimanche avant d’être brûlée, il a été remarqué sur les murs des affichettes recommandant un boycott des produits égyptiens. «Ce n’est pas bon et nullement rentable de faire cela», estime un cadre financier de l’APC. Selon lui, il faut au contraire «montrer aux Egyptiens que les Algériens sont plus éduqués et plus civilisés qu’eux ». Arrivés devant l’agence de Djezzy du boulevard Belouizded, nous assistons à un face-à-face entre les forces de l’ordre et des groupes de jeunes qui cherchaient à saccager les locaux de l’agence en l’attaquant avec toutes sortes d’objets. Toutefois, au bout d’un quart d’heure de «débats» contradictoire entre les deux parties, les forces de l’ordre sont parvenues quand même à dissuader les émeutiers, qui ont fini par renoncer à leur projet, se constituant en cortège bruyant pour remonter le boulevard en scandant les slogans à la gloire de l’équipe nationale. (Le Quotidien d’Oran)

A Alger, un bijoutier égyptien a vu sa boutique dévalisée par la foule:

Rumeurs, tension et agitation à Alger

par Ghania Oukazi (Le Quotidien d’Oran)

Les agences Djezzy, Egypt-Air, une bijouterie appartenant à un ressortissant égyptien ont été saccagées par des groupes de jeunes aveuglés par un esprit de vengeance désolant.

Après l’ébullition qui s’est emparée dimanche après-midi de centaines de jeunes qui ont assiégé la place Maurice Audin dans l’espoir de décrocher un billet de l’agence Air Algérie pour aller à Khartoum, la matinée d’hier s’annonçait calme. Rien ne présageait que les manifestations de soutien à l’équipe nationale allaient dégénérer. Et pourtant si. L’espoir de vaincre demain l’équipe égyptienne à Khartoum s’est transformé en une fureur de vengeance terrifiante et désolante. La bijouterie faisant face au marché Meissonnier a été saccagée et tous les bijoux exposés ont été volés. Le groupe de jeunes qui a procédé à cette sale besogne a appris, comme par hasard, que le propriétaire de la boutique est un ressortissant égyptien.

Des agences de l’opérateur privé de la téléphonie mobile, Djezzy, dont le propriétaire est aussi égyptien, ont été saccagées à l’exemple de celle de Dar El-Beïda à l’est d’Alger, celle de Bab El-Oued et celle située à place Audin. L’agence de la compagnie Egypt-Air l’a été au même moment. L’odeur de brûlé empestait encore l’atmosphère dans le milieu de l’après-midi d’hier. Les rideaux de l’agence, baissés depuis longtemps, ont été défoncés, les documents déchirés et les ordinateurs mis en miettes ont été jetés sur le trottoir de la rue Didouche Mourad.

Heureusement, en prévision des violences populaires, l’agence EgyptAir était fermée et donc vide au moment des faits, qui n’ont donc fait que des dégâts matériels. Le feu a néanmoins été mis à l’agence, au pied d’un immeuble, dont les habitants ont craint pour leur vie:

Le siège d’Egypt Air a été saccagé en plein centre d’Alger lundi par des centaines de supporters de l’équipe algérienne de football, qui ont défoncé portes et fenêtres avant de mettre le feu au mobilier, a constaté un journaliste de l’Associated Press.

Un énorme panache de fumée noire s’est dégagé des fenêtres donnant sur le boulevard Mohamed V, rendant du coup la visibilité quasiment nulle pour les automobilistes qui, contraints de s’arrêter, ont participé du coup la mêlée générale.

« One, two, three, viva l’Algérie« , scandaient les supporters, filles et garçons, pendant que les sapeurs-pompiers tentaient d’éteindre les flammes pour empêcher le feu d’atteindre les étages supérieurs de l’immeuble, d’où s’élevaient des cris d’angoisse des occupants.

« Je n’ai pas pu obtenir un billet pour aller à Khartoum (Soudan) aujourd’hui, mais pour moi, participer à la mise à sac de cette agence est une façon de venger le sang de nos camarades joueurs qui ont échappé à la mort« , a déclaré à l’AP l’un des supporteurs, Karim Habili, étudiant en interprétariat à la faculté d’Alger Centre. (…) Les services de sécurité déployés sur les lieux de l’incendie au siège d’Egypt Air lundi tentaient de convaincre la foule de s’éloigner des flammes, sans user de leurs matraques. Selon un officier de police ayant requis l’anonymat, « ordre a été donné de haut de canaliser la foule sans recours à la violence pour éviter des dérapages » (The Canadian Press).

A Bouira, une agence de Djezzy a été mise à sac par des centaines d’émeutiers. Le siège de Djezzy à Alger a également été saccagé, les ressortissants égyptiens s’y trouvant ayant du chercher refuge dans un hôtel international avoisinant:

Dimanche soir c’est le siège flambant neuf de l’opérateur de téléphonie mobile Djezzy, du groupe égyptien Orascom, qui avait été vandalisé à Bab Ezzouar par des centaines de jeunes supporteurs arrivés des quartiers environnants. Des véhicules de service ont été incendiés, du matériel informatique et des milliers de téléphones portables ont été subtilisés par les manifestants aux cris de « le peuple avec vous les Verts« . Le personnel de nationalité égyptienne s’est réfugié dans un hôtel international situé à 500 mètres du siège vandalisé.

De nombreux autres bureaux et boutiques de Djezzy ont été mis à sac dimanche soir et lundi à travers le territoire algérien. (The Canadian Press)

Plus de détails sur la mise à sac du siège de Djezzy:

A crowd of Algerian football supporters attacked the headquarters of the Algerian subsidiary of Egypt’s Orascom Telecom (ORTE.CA) (ORTEq.L), smashing windows and destroying office equipment, the company said on Monday.

The offices, in a suburb of Algiers, were attacked on Sunday night, a day after a soccer World Cup qualification match between Egypt and Algeria which sparked reports that Algerian supporters had been assaulted by rival fans.

Metal fencing surrounding the office complex was ripped down while inside the complex, computer monitors, office chairs and water coolers were lying on the ground, a Reuters reporter who visited the scene on Monday said.

Windows in a guardhouse were smashed in the attack. At least a dozen vehicles in the office car park had broken windows. Riot police with water cannon were parked outside the complex.

« During these acts of vandalism telephone and computer equipment was subject to ransacking, theft and looting, » the subsidiary, which operates under the name Djezzy, said in a statement seen by Reuters. (Reuters)

La direction de Djezzy à Dar El-Beïda attaquée par des émeutiers – Le personnel est épargné

Liberté  Par : DJAZIA SAFTA

Des jeunes avec des chaises ou des unités centrales de micro-ordinateurs, des imprimantes, des extincteurs, des paquets de puces et même des verres d’eau    courant dans tous les  sens criant à tue-tête “One, two, three, viva l’Algérie”. C’est l’image de l’assaut lancé contre le siège de Djezzy. Des jeunes plus déchaînés les uns que les autres, ivres de colère, avec une seule idée en tête : détruire tout ce qui est égyptien. Des policiers anti-émeutes et les brigades d’intervention spéciales étaient sur les lieux, mais personne n’a pu calmer ces jeunes fous de rage et déterminés à aller jusqu’au bout de leur action. Selon des témoins présents sur place, l’assaut “a débuté vers 17h30 quand des jeunes ont commencé à affluer de partout pour se rassembler devant la direction générale de l’opérateur. Juste après, la tension montant, — ils ont commencé à forcer les barrières de sécurité et le barrage de police, présent 7 j/ 7 et 24h/24 —, n’a pu que constater les dégâts. Selon des témoignages de policiers présents sur place, les émeutiers ont commencé à lancer des pierres sur les policiers, contraints de se retirer. Une fois l’obstacle des forces de l’ordre dépassé, ils sont rentrés au parking de la direction pour s’en prendre aux véhicules du personnel encore présent sur les lieux”.

Les policiers affirment, par ailleurs, que les employés n’ont pas été touchés et personne n’a été blessé. Par ailleurs, nos interlocuteurs nous ont confié que durant cette “altercation”, deux policiers et une dizaine de jeunes émeutiers seront blessés. L’un d’entre eux, qui a requis l’anonymat, nous a révélé que “l’information concernant la destruction du siège de Djezzy, si l’Algérie perd, circulait depuis mercredi. C’est pour cela que le dispositif qui protège la bâtisse a été renforcé”.  Mahdi, un jeune présent raconte : “Il était  19h30 quand des jeunes ont commencé à se rassembler devant Djezzy et tenté de défoncer les barrières qui finissent pas céder. Ensuite, ils ont pris d’assaut l’immeuble où ils ont tout dévalisé ; ce qu’ils n’ont pu prendre a été détruit et brûlé.” Il ajoute que “les forces de l’ordre présentes sur place nous ont frappés avec des matraques.”

Un autre émeutier recommande : “Nous appelons tous les Algériens abonnés chez Djezzy à détruire leurs puces.” La colère des jeunes présents sur place était grande au point que l’un d’entre eux nous a avoué : “Ce que vous voyez aujourd’hui ce n’est rien, si on perd mercredi, ce sera cent fois pire.” Son ami a tenu à souligner que leur présence sur les lieux, “c’est par pure curiosité”, tout en témoignant sa colère face aux traitements auxquels avaient eu droit les Algériens. “Le problème n’est pas le fait de perdre un match de football, mais ce sont nos frères qui sont morts là-bas. Ils en ont tué 4 et c’étaient des étudiants partis assister à une rencontre de foot et supporter leur équipe nationale et la voir qualifiée, après tant d’années, au Mondial”. Et de poursuivre : “Je sais que casser des immeubles ou des magasins, c’est nul mais le plus triste c’est que cela ne va pas rendre la vie à nos frères morts”, regrette-t-il, les larmes aux yeux.  Certains jeunes ont même refusé l’offre de Djezzy de payer le billet d’avion à 10 000 Algériens pour assister à la rencontre de mercredi à Khartoum. “Nous n’avons pas besoin de Djezzy, nous avons nos propres sponsors. De plus, nous préférons partir avec nos propres moyens que de recevoir le moindre centime de leur part”, explique un des émeutiers. Au même moment où l’immeuble de Djezzy était mis à sac, les jeunes faisaient des affaires en tentant de vendre leur butin.

Des présents nous relatent que “des micro-ordinateurs sont cédés à El-Qaria à 6 000 DA”. Un autre renchérit en assurant qu’on lui a proposé deux PC HP dernier cri à 20 000 DA. Les anecdotes n’en finissent pas. Un autre jeune nous assure avoir vu un “frère musulman” sortir avec un PC portable caché sous sa gandoura et donner rendez-vous à son ami lors de la prière du fadjr. Un autre renchérit que “même des enfants de riches étaient de la partie. Il y a ceux qui volent juste pour le plaisir.” Minuit et les jeunes ne décolèrent toujours pas. “Les jeunes se sont scindés en deux groupes. Le premier s’est attaqué au centre de réclamations à quelques mètres  de l’immeuble saccagé où ils ont fait exploser un tuyau de gaz. Ce qui a créé un mouvement de panique chez les résidents de l’immeuble où sont les bureaux de l’opérateur. Quant à l’autre groupe, il est parti à la zone industrielle de Oued Smar où ils se sont introduit dans les ateliers où les puces sont fabriquées. Même scénario que celui de la direction ; tout a été détruit.”

Le calme ne sera revenu à Dar El-Beïda que tard dans la soirée.

Les émeutiers ont visé non seulement les sociétés, mais également les hôtels et logements soupçonnés d’abriter des Egyptiens, certains émeutiers étant armés de couteaux:

Ayman Sayyed, an engineer who returned with his wife and daughter, said on arrival at Cairo airport that on Sunday « 400 Algerians besieged the building where we live with other Egyptians, but we managed to get out. » Mohannad Ibrahim, an accountant, said for his part that « our house was surrounded by Algerians carrying knives, but we were able to escape via the roof. » (AFP)

A Oran, le complexe résidentiel accueillant le personnel égyptien de la société OTA a été assiégé par des émeutiers avant d’être dégagé par les forces de l’ordre (il faut souligner au passage que les forces de l’ordre algériennes semblent plus fermes que leurs homologues égyptiens – il est vrai aussi que la violence en Algérie touche tout le pays et des cibles très diverses, contrairement à ce qui fût le cas au Caire):

A Oran, le siège d’OTA n’a pas été attaqué, contrairement aux rumeurs qui ont circulé dans la ville toujours parée aux couleurs nationales.

Le soir, alors que des Egyptiens regroupés dans la base de vie de l’entreprise Orascom donnaient les rumeurs les plus alarmistes à la chaîne satellitaire Mehwer faisant état d’un véritable lynchage, des jeunes de Chehaïria, où est implanté le camp que nous avons contacté, ont été unanimes à dire que cela relevait du mensonge et de la grossière manipulation.

«Comment voulez-vous que des milliers d’Algériens investissent un camp situé dans une zone sécurisée relevant du secteur des hydrocarbures et où l’accès est strictement filtré». Des jeunes qui habitent des zones du camp, outrés par le comportement de certains Egyptiens qui n’avaient pas cessé depuis le match de les provoquer, ont tenté d’investir les lieux.

Cette situation de tension a duré de 19h jusqu’à 22h. L’arrivée des gendarmes a permis la levée du siège», dira un élu de la commune de Bethioua dont relève la localité de Chehaïria. Hier, des sources locales ont indiqué que des Egyptiens avaient fait leurs bagages et exigé le transport pour rentrer dans leur pays.

«Les autorités locales se sont déplacées sur les lieux pour rassurer ces travailleurs, et toutes les dispositions ont été prises pour renforcer la sécurité du site dont le gardiennage est assuré par l’entreprise de sécurité chargée de la zone industrielle d’Arzew, les services de sécurité et les agents de sécurité d’une entreprise sous contrat avec Djezzy. Il ne leur arrivera aucun malheur, contrairement à certaines chaînes qui avec des pseudo-correspondants se présentant comme des résidents du camp ont voulu faire un scoop», dira la même source. (Le Temps d’Algérie)

Un restaurant acceuillant des employés égyptiens d’Orascom a également été pris d’assaut, seule l’intervention des forces de l’ordre sauvant les Egyptiens du lynchage:

Un groupe d’Egyptiens travaillant pour l’opérateur mobile Djezzy a été attaqué, dimanche à l’heure du déjeuner, par des jeunes algériens à Bab Ezzouar, dans la banlieue-Est d’Alger selon des source policière. Les Egyptiens se trouvaient dans un restaurant non loin de l’hôtel Mercure d’Alger où ils étaient venus déjeuner lorsque des jeunes Algériens ont pénétré à l’intérieur. Bilan : plusieurs Egyptiens blessés, dont un dans un état grave, selon la même source. L’intervention rapide de la police a permis d’éviter le pire. Le quartier était toujours bouclé dimanche à 16 heures et les mesures de sécurité considérablement renforcées autour du siège de Djezzy.

Un autre égyptien, occupant le poste de Directeur général au sein de Djezzy, a été agressé à l’aéroport d’Alger par des supporters algériens revenant d’Egypte, selon l’opérateur mobile. Djezzy est une filiale de l’égyptien Orascom. (Le Matin)

Conséquence: les ressortissants égyptiens résidant en Algérie commencent à fuir le pays, du moins ceux qui le peuvent, en premier les expatriés égyptiens travaillant pour les importants intérêts commerciaux égyptiens présents en Algérie:

Des Egyptiens quittent l’Algérie à cause des violences

AFP 16.11.2009, 19h10

Une centaine de personnes ont quitté l’Algérie à cause des violences visant les ressortissants égyptiens à l’approche du match d’appui Algérie-Egypte, mercredi soir à Khartoum, qui décidera laquelle des deux équipes sera qualifiée pour le Mondial 2010, et sont arrivées à l’aéroport du Caire. Ayman Sayyed, un ingénieur égyptien revenu au Caire avec sa femme et sa fille, a raconté à son arrivée que « dimanche soir, 400 Algériens ont assiégé l’immeuble où nous vivons avec d’autres Egyptiens, mais nous avons réussi à sortir« . Selon certains témoignages, des expatriés égyptiens ont dû être regroupés dans des zones sécurisées par la police algérienne.

Afin de se protéger sans doute contre les hooligans et surtout le boycott commercial de l’Egypte prôné par de nombreux journaux algériens, Djezzy a décidé de financer le voyage de 10.000 supporters algériens pour Khartoum. Son PDG, l’Algérien Hamid Grine, a mis en avant les contrats de sponsor qui la lient à quatre joueurs algériens, et accuse sa concurrente Nedjma d’attiser les rumeurs sur le soutien de Djezzy à l’équipe nationale égyptienne. Les pertes de Djezzy suite aux émeutes anti-égyptiennes sont substantielles, 70.000 téléphones portables ayant été volés par les émeutiers:

« les pertes sont estimées à plusieurs millions de dollars». Il a indiqué, en outre, que 15 agences ont été ciblées par les milliers d’émeutiers, précisant que «le préjudice de ces attaques seront évalués par des rapports d’assurances et ceux des services de police». «70 000 portables d’une valeur de 5 millions de dollars ont été volés», devait-il indiquer substantiellement. (Le Temps d’Algérie)

La maison mère de Djezzy, le groupe égyptien Orascom, a décidé de rapatrier les cadres égyptiens présents en Algérie:

Selon nos informations, l’opérateur Orascom Telecom a décidé de rapatrier en Egypte l’ensemble de ses cadres égyptien travaillant à Djezzy.   Les premiers cadres de l’opérateur mobile ont quitté Alger dimanche soir. Les autres devraient rejoindre le Caire lundi dans la journée. Les cadres égyptiens de Djezzy qui se trouvaient en fin de semaine en Egypte ont décidé de ne pas regagner l’Algérie. Tous les expatriés égyptiens de Djezzy sont concernés par cette mesure, la première du genre depuis l’implantation en 2002 du groupe en Algérie. Par ailleurs, toutes les agences de Djezzy ont été placées sous haute surveillance des forces de sécurité.   Cette décision a été prise pour des raisons de sécurité. Dimanche, des cadres égyptiens de Djezzy ont été attaqués dans un restaurant situé non loin de Bab Ezzouer, dans la banlieue-Est d’Alger. Un directeur de Djezzy a également été agressé à l’aéroport d’Alger par des supporters algériens de retour du Caire.

Au Soudan, juste retour des choses, c’est le bus de l’équipe égyptienne qui a à son tour été caillassé – par des supporters algériens en toute vraisemblance.

La presse algérienne a réagi de manière diverse: à leur honneur, de nombreux journaux ont couvert aussi bien les violences contre les Algériens en Egypte que contre les Egyptiens en Algérie (avec mention spéciale pour cet article de Ghania Oukazi dans le Quotidien d’Oran). Le Matin, tout en semblant cautionner dans un article la violence contre les Egyptiens en Algérie (« Des égyptiens attaqués à Alger : quand on sème la haine, on récolte la violence« ), parle de « chasse à l’Egyptien« . El Watan s’est extasié sur les « braves Marocains, emblème algérien à la main pour supporter nos Verts » le lendemain d’un éditorial – « Hagrouna » – commençant ainsi:

Devant les soldats marocains qui franchirent belliqueusement en 1963 la frontière algérienne, Ben Bella, le premier président de la République, eut ce cri chargé d’une forte intensité patriotique : hagrouna ! (On nous a agressés). Il n’en fallut pas plus aux Algériens qui venaient à peine de sortir de la nuit coloniale pour se rendre, par milliers, aux frontières défendre, mains nues, leur sol convoité. Aujourd’hui, une hogra d’un autre type est venue d’un pays présenté comme ami depuis toujours par l’idéologie baâssiste, l’Egypte, où un odieux guet-apens a été tendu à l’équipe algérienne de football. Manigancé en haut lieu, au Caire, le plan machiavélique visait à fragiliser et faire perdre le match aux joueurs algériens, et c’est ce qui arriva.

L’Expression appelle à la rupture des relations diplomatiques avec l’Egypte (qui a d’ailleurs convoqué l’ambassadeur algérien au Caire pour consultations):

Il y a lieu de s’interroger devant une telle situation: que reste-t-il de «la fraternité» algéro-égyptienne? Le pouvoir algérien, qui s’est suffi de condamner les agressions, doit prendre des mesures strictes aussi bien sur le plan politique qu’économique. A quoi sert-il d’avoir des relations diplomatiques avec un pays qui a manifesté une haine viscérale envers l’Algérie, ses symboles et son peuple? Devant une telle situation, l’Algérie doit rappeler son ambassadeur au Caire. Une éventualité que la presse a dévoilé ces derniers jours. Quant à sa présence à la Ligue arabe, il suffit juste de maintenir une présence diplomatique symbolique au Caire. (…)

L’Algérie constitue un espace vierge pour les intérêts égyptiens. Les Egyptiens se font de la fortune sur le dos de l’Algérie et expatrient leurs devises en Egypte. En contrepartie, nos intérêts économiques en Egypte sont très minimes pour ne pas dire inexistants. Quel intérêt d’avoir, ainsi, des relations économiques qui vont dans l’intérêt unilatéral, d’un seul pays, l’Egypte? A commencer, même s’il le faut, par la réduction des vols aériens reliant les deux capitales.

A la veille du match de barrage à Khartoum, certains sites citent complaisamment les commentaires meurtriers de certains supporters algériens:

« Les Egyptiens sont terrorisés, ici à Khartoum. Mais nous avons décidé de ne rien faire qui pourrait gêner l’équipe nationale. A la fin du match, on verra. Si on doit tuer tous les Egyptiens, on le fera».

Lundi soir, à Khartoum, Badroo, le célèbre supporter de l’ES Setif et des Verts, joint au téléphone par TSA était confiant. Les supporters algériens ont déjà pris le contrôle de la ville face à des Egyptiens terrorisés. (…)

Lundi soir, les supporters algériens ont effectué une première démonstration de force : ils ont rendu visite à un hôtel qui héberge des supporters égyptiens. « Nous leur avons montré seulement qu’on était là, présents. Ils sont terrorisés. Nous avons rebroussé chemin sans rien faire », affirme Badroo. (…)

« Des femmes ont été violées et des Algériens tués en Egypte. Il faut se venger », affirme un supporteur rencontré devant l’agence Egypte Air située place Audin au centre d’Alger. Cette agence a été complètement détruite lundi par les manifestants qui scandent des slogans de guerre. « Djeich, chaâb, maâk ya Saâdane » où encore « Maâyak ya Saâdane fi soudane moudjahidin », crient haut et fort des jeunes, torses nus. (…) (Tout sur l’Algérie)

Les supporteurs algériens continuaient de manifester mardi dans les rues d’Alger en soutien à l’équipe nationale qui affronte l’Egypte mercredi à Khartoum en match d’appui pour la qualification au Mondial 2010. Des milliers de personnes sont rassemblées devant la Grande poste.

Ils chantent, dansent en scandant des slogans hostiles à l’Egypte. « Oulach smah oulach » (pas de pardon), « Bab El Oued chouhada« , « Sehata nlabsolu lfergani« , « les Algériens« , « Mort aux Egyptiens« , sont autant de slogans scandés par des supporters toujours en colère après l’agression sauvage contre l’équipe nationale au Caire. (Tout sur l’Algérie)

Si la FIFA était véritablement animée par l’esprit sportif, une solution s’imposerait: annuler le match de barrage, suspendre les deux équipes des compétitions internationales pour un an et des matches à domicile devant public pour deux années supplémentaires, et donner la cinquième place africaine pour le Mondial 2010 au meilleur second des groupes de qualification, à savoir le Burkina Faso, deuxième du groupe E avec 12 points. Mais on peut toujours rêver, hélas, notamment ne lisant le communiqué d’une incroyable tiédeur publié aujourd’hui…

Pour les inconditionnels d’al ousboue al faras et des chatons de l’Atlas

Les partisans de la semaine du cheval et des constantes civilisationnelles cosubstantielles à la personnalité marocaine, laquelle est ancrée dans ses traditions ancestrales mais ouverte sur l’Autre, peuvent respirer: la campagne nihiliste aura beau souffler de toutes ses forces, rien n’ébranlera la Haute Sollicitude dont bénéficie le glorieux patrimoine équestre marocain. Deux absences me turlupinent cependant à la lecture du programme de vette manifestation placée sous le Haut Patronage Royal:

Le public pourra découvrir et apprécier diverses facettes du cheval et de l’art équestre, à travers les galeries, les expositions (peinture, oeuvres d’art, manuscrits) et les stands organisés pour l’occasion, dont ceux des Forces Armées Royales, de la Garde Royale, de la Gendarmerie Royale, de la Sûreté Nationale, des Forces Auxiliaires, de la Fédération Royale marocaine des sports équestres et du Complexe Royal des sports équestres et Tbourida de Dar Essalam, outre les espaces dédiés aux régions.

Les amis de l’ordre auront noté avec effroi l’absence de stands de la DGED et de la DST – rien de grave j’espère? Heureusement que la sensibilité artistique des FAR permet de calmer de telles anxiétés: « Les FAR participent avec une exposition et une présentation sur la cavalerie et les métiers équestres« .

Dans le même ordre d’idées, les fans du foot marocain et de son équipe nationale seront rassurés d’apprendre que les mauvais résultats de l’équipe nationale sont dûs à tout le monde sauf aux quatre entraîneurs de l’équipe nationale agissant sous la houlette de Hassan Moumen, que Dieu multiplie sa progéniture: un agent de joueurs, Youssef Hadji (que Dieu flétrisse son pied droit), voire sans doute la presse indépendante, mais certainement pas à l’ex-entraîneur du FUS de Rabat, présidé par Mounir Majidi, que Dieu lui prête longue vie, et dont le président de la Fédération royale marocaine de football, Ali Fassi Fihri, frère du ministre des affaires étrangères et mari de la ministre de la santé tout en étant neveu du premier ministre, est membre du comité directeur. On notera par ailleurs que dans un effort louable d’étendre son assise populaire aux anciens élèves du lycée Descartes, le site officiel du FUS n’existe qu’en langue française.

La traduction est un dur métier quand on n’aime pas le foot

En lisant un article – « Phénomène cacochyme » – de l’excellent revue Agone, consacré à l’écrivain allemand Ernst Jünger, je suis tombé sur une belle coquille de traduction que le traducteur eût pu éviter s’il s’intéressait plus au futebol, discipline dont on ne soulignera jamais assez les vertus intellectuelles.

Je cite:

Nous ne nous risquons pas à répondre à cette montagne de questions, encore moins à nous les poser. En revanche, l’anthroposophe de la culture Wolf von Homburg a eu le culot de prier Jünger en juin 1997 de coucher ses souvenirs de 1974 sur la Porte Sparwasser. Jünger lui a fait répondre par une lettre du 11 juillet 1997 de Langenenslingen-Wilflingen : « Ernst Jünger vous remercie de votre lettre. En ce qui concerne votre enquête auprès d’auteurs, Ernst Jünger n’a de sa longue vie jamais assisté à la moindre partie de football, ni ne s’est jamais occupé du jeu lui-même. Eu égard à la troisième question : il ne peut que regretter qu’on prête à des jeux nationaux des intentions politiques. Amicales salutations, par délégation, Georg Knapp. »

Peut-être est-ce là le secret d’une longue vie : pas de football. Et ne pas prêter d’intentions politiques. Et aussi quelqu’un pour descendre la poubelle et s’occuper de la correspondance.

En VO, la réponse d’Ernst Jünger donne ceci:

Ernst Jünger dankt für Ihren Brief. Was die Autoren-Umfrage betrifft, so hat Ernst Jünger in seinem langen Leben kein einziges Fußballspiel gesehen, noch sich mit dem Spiel selbst befaßt. Er kann es nur bedauern, daß Nationalspiele politischen Wertungen unterlegt werden. Mit freundlichen Grüßen, i. A. Georg Knapp

Pour ceux qui l’ignoreraient, dont le traducteur en cause, « das Sparwasser Tor » n’est pas un monument de Berlin mais plutôt le but légendaire du joueur est-allemand Jürgen Sparwasser marqué le 22 juin 1974 lors du match RDA-RFA 1-0 90 minutes de lutte des classes – lors de la Coupe de monde de 1974, qui se jouait justement en Allemagne de l’Ouest. Sur le mode de « où étiez-vous lorsque vous avez appris l’assassinat de JFK« , les Allemands de cette génération se posent la question « Wo waren Sie, als das Sparwasser-Tor fiel? » (« Où étiez-vous lors du but de Sparwasser?« ) – un livre éponyme est même sorti.

Traduttore, traditore…

Can’t help it

uniyted6

1-4, 1 bloody 4!

steven-gerrard_1364692c

En Asie, paraît-il, il y aurait des chiffres fétiches et des chiffres maléfiques – et en Europe, le chiffre 13 est bien connu des superstitieux. Pour Liverpool, quatre est le chiffre de la semaine.

Il y eût tout d’abord la démolition du Real Madrid, 4-0 à Anfield Road en semaine (les buts sont ici).
real-madrid-001

Si ce ne fût pas la plus lourde défaite du Real Madrid en Coupe d’Europe (0-5 contre l’AC Milan en 1989/90), et si Liverpool avait déjà gagné 1-0 à Santiago Bernabeu, le score est là, et fût obtenu avec la manière – selon Reuters, Liverpool aurait pu en mettre le double, tandis que l’Irish Times écrit que les traditionnels maillots blancs du real étaient comme des drapeaux blancs. Rafael Benitez, entraîneur de Liverpool, a entraîné le Real, et Fernando Torres, le génial avant-centre blond de Liverpool, est issu de l’Atletico Madrid et était ravi d’avoir marqué et coulé le Real, qu’il ne porte vraiment pas dans son coeur.
fernando-torres_1364080c

La presse britannique avait relevé que Benitez, qui n’est pas expansif, avait failli sourire

Puis il y a eu la démonstration tout à l’heure: Manchester United – Liverpool 1-4, à Old Trafford – même les derbies entre Everton et Liverpool n’atteignent le degré de ressentiment des rencontres United-Liverpool. La dernière fois que Liverpool avait marqué 4 buts à Old Trafford, Moulay Hafid était Roi du Maroc (c’était en 1910, bande d’ignares…). La dernière fois que Liverpool a fait un doublé contre United en Premier League (victoire à domicile et à l’extérieur) c’était en 2001. En plus de cent saisons de championnat anglais, United n’a perdu que neuf fois par ce score à domicile. Menés 1-0, Liverpool a non seulement remonté la pente mais joué sur la fin avec United, et aurait dû gagner par 5-1 si Gerrard n’avait manqué une occasion immanquable vers la 90eme minute. Ronaldo a marqué le but de United, et c’est la première fois qu’ils perdent un match à domicile dans lequel il a marqué. On a pu voir Nabil el Zhar, le joueur marocain de Liverpool, jouer quelques minutes sur la fin – son onzième match de championnat de la saison.

Le plus délectable dans cette victoire est le contexte récent de la rivalité United/Liverpool. Début janvier Rafa Benitez avait été cloué au pilori par la presse anglaise pour avoir critiqué Sir Alex Ferguson, le génial et caractériel entraîneur de Man United, connu pour harasser arbitres et officiels lors des matches, dans une diatribe assez soutenue. Ferguson avait ironisé sur Benitez, se demandant si ses nerfs avaient lâché – « to crack up » en anglais. Et comme par hasard, Liverpool a ensuite connu une période de matches nuls à répétition, perdant son avance en championnat et se retrouvant largement devancé maintenant. Puis, quelques jours avant le match, Wayne Rooney – entre parenthèses meilleur joueur de Man United avec Michael Carrick lors de leur déroute d’aujourd’hui – avait avoué haïr Liverpool. Il est vrai que s’il est natif de Liverpool, Wayne Rooney a supporté puis joué pour le rival local de Liverpool, Everton. Alex Ferguson a défendu son joueur, déclarant ne réfréner aucun de ses joueurs

Mission accomplie: le dernier quart d’heure, on entendait plus que les supporters de Liverpool, qui sur la fin ont abandonné « You’ll never walk alone » pour un « Rafa’s cracking up » sardonique (c’était jusque là un chant favori des supporters de Manchester United), tandis que Steven Gerrard déclarait à la fin du match « considering the stick we’ve been taking from United fans over the years, it’s been nice to rub it in a bit » (« compte tenu des moqueries subies de la part des supporters de Manchester United pendant des années, ça fait plaisir de remuer un peu le couteau dans la plaie« )…

Ce ressentiment entre clubs est la preuve de la persistance de l’esprit de club – chose qui se perd entre joueurs aujourd’hui dans les pays où les joueurs sont majoritairement étrangers (Espagne, Angleterre, et dans une moindre mesure l’Italie) – la preuve, Fernando Torres le madrilène realophobe et Wayne Rooney le liverpudlien liverpoolophobe, réagissent car ils furent supporters avant d’être joueurs. Ces choses-là ne s’acquièrent pas avec le chèque de fin de mois, mais sont le reflet d’un enracinement local – et c’est cela qui fait la force du foot jusqu’à aujourd’hui, la capacité d’engager au-delà de la simple consommation – puisqu’il s’agit de ça – d’un spectacle. C’est ce qui fait son nerf – l’incapacité des Etatsuniens à comprendre l’esprit de rivalité au sein du foot en est la preuve, eux chez qui les clubs déménagent littéralement de ville en ville à la merci des changements de propriétaires: le Raja pourrait déménager à Laayoune et le Wydad à Ketama selon ce régime purement commercial… 

Malheureusement, Liverpool semble cette saison ne se mobiliser que contre les grandes équipes, et a perdu des points de manière stupide contre des équipes de la valeur de Stoke, Wigan et Middlesbrough. Après avoir dominé le classement jusqu’au début janvier, Liverpool est désormais quatre points après United avec un match en plus, soit potentiellement sept points de retard avec neuf journées à jouer. C’est d’ailleurs structurel: depuis 1990, Liverpool n’a plus remporté de championnat, mais seulement des coupes – dont l’inoubliable finale de Ligue des Champions de 2005 – comme le rappelle l’ancien joueur Steve Mac Manaman:

« In knockout games home and away, Liverpool know how to get results but it’s sustaining that and getting them over 38 games in the Premier League where they have faltered, » he said.

Mais peu importe finalement, car la victoire finale n’est pas tout: cette semaine restera dans la légende, comme cette fameuse CAN 2004 où les supporters marocains ont (presque) oublié la défaite en finale contre la Tunisie (1-2) mais pas la victoire 3-1 contre l’Algérie, où j’ai littéralement failli m’évanouir de joie lors de l’égalisation de Chemakh aux arrêts de jeu. 

Une petite anecdote: je ne peux m’empêcher de sourire à chaque fois que je vois à Rabat une certaine voiture de l’ambassade d’Algérie avec la plaque jaune diplomatique et le numéro 3-1 – une provocation de la part d’un fonctionnaire de la direction du protocole du ministère des affaires étrangères, sans doute…

« He obviously never went to a Norwich-Millwall game »

L’humour anglais est irrésistible. Sur le mode du mensuel anglais 4-4-2, adepte d’articles et de listes sur le mode « les dix meilleurs écrivains à avoir joué un match de FA Cup » ou « les dix meilleurs buts du pied droit marqués par des gauchers », le plus, le plus sérieux quotidien The Times a présenté une liste des cinquante pires supporters de foot de l’histoire – on y retrouve Wayne Rooney, les frères Gallagher (Oasis), Elton John, TomHanks, David Beckham et Mussolini – mais le haut du podium est occupé par feu le Reichskanzler Adolf Hitler.

Le commentaire est irrésistible, pour qui connaît un peu les catacombes du championnat anglais:

1. Adolf Hitler (Schalke 04)

Hitler may have bombed Old Trafford, but he wasn’t a Manchester City fan. The Fuhrer had a soft spot for Schalke, who, funnily enough, were German champions six times between 1933 and 1945. “Winning a match,” Joseph Goebbels, Hitler’s propaganda chief, wrote, “is of more importance to the people than the capture of a town in the East.’” He obviously never went to a Norwich-Millwall game.